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21/12/2015

BENIN: Le mythe du messie

Les caciques des FCBE peuvent déjà commencer à faire leurs valises. A compter du 29 février le palais de la présidence et les ministères seront pour eux comme des enfers. Non pas parce qu’ils auraient mérité d’en être chassés, mais parce qu’ils ont accepté l’imposture Zinsou.


C’est une imposture majeure que les barons de la mouvance ont entérinée vendredi, au lieu d’ouvrir tous ensemble la bouche pour dire au Chef de l’Etat que sa potion est amère, vraiment trop amère pour être avalée. Au lieu d’oser le courage de dire non, ils vont se faire voler leur victoire par les regroupements politiques plus réalistes et plus conquérants.
L’opportunisme maladif des cadres de ce pays, leur corruptibilité presque infinie, l’incapacité dans laquelle ils sont de se libérer des cercles politico-religieux qui embrigadent leurs esprits, ont eu raison de leur liberté de pensée. C’est ce qui est à la base de l’imposition brutale de Lionel Zinsou comme candidat des FCBE. Ouvrier de la 25ème heure au sein de l’alliance, celui qui se définit lui-même comme un « petit peu béninois », aura fort à faire s’il veut concrètement devenir Chef de l’Etat. Car la messe funèbre dite au palais des Congrès ce 18 décembre, sonne le glas des FCBE. L’enthousiasme était à un niveau zéro, les mines étaient renfrognées, l’incompréhension et la bêtise se lisaient sur les visages. Pour qui connait la politique béninoise, c’est mauvais signe. Ils vont dribler le blanc !


Ils vont le dribler et Zinsou le mérite bien. Il le mérite parce qu’il veut faire le jeu des imposteurs qui pensaient se maintenir au pouvoir en l’utilisant comme cheval de Troie, afin de perpétrer les prévarications en tout genre qui se sont accumulées sous le couvert des FCBE. Mais pour Lionel Zinsou lui-même, c’est une outrecuidance majeure de penser que l’on peut gouverner un pays aussi difficile que le nôtre en étant parachuté de l’Hexagone, cheveux sur la soupe politique, débarqueur et même mercenaire électoral par-dessus le marché. Non, Boni Yayi peut lancer mille routes pour manipuler les plus faibles, promettre cent mille emplois, recruter autant de douaniers et d’inspecteurs des impôts qu’il veut pour adoucir qui il veut, cette fois-ci, sa ficelle est trop grosse pour que les Béninois ne voient pas le trou géant dans lequel il se conduit et les conduit.


De la diaspora, on peut tout dire et même tout obtenir. Seulement, les circonstances ont si radicalement changé entre 1990 et 2015, qu’il est littéralement impossible de rééditer les expériences qui ont jadis permis de conduire un Béninois de l’extérieur à la Marina. En 1991, nous sortions de la banqueroute créée par le régime du PRPB. Le pays était placé sous les fourches caudines des institutions de Bretton Woods. C’était l’urgence de sortir de cette faillite du système qui avait fait tourner tous les regards vers un messie venant d’ailleurs.
En 2006, Boni Yayi, venant de la diaspora, avait lui aussi conquis le cœur des Béninois. Mais il profitait d’une fin de règne hypothétique de Mathieu Kérékou qui avait largement échoué au plan économique et sur le volet de la bonne gouvernance. Les Béninois ne voulaient plus d’une classe politique qui avait collaboré avec lui. Boni Yayi apparaissait comme le messie. Mais aujourd’hui, l’ère des messies est révolue. Et Lionel Zinsou devrait savoir qu’aucun peuple au monde n’acceptera cette espèce d’injure.


Oui, l’establishment FCBE, perclus de mille scandales et tenu en laisse par le maitre du changement, sera obligé de brouter là où on l’aura attaché. Mais on oublie trop vite que le peuple béninois a rejeté la mouvance de 2006. On n’a pas besoin d’être un agrégé de sciences politiques pour se rendre compte que la mayonnaise Zinsou ne prend pas et ne prendra pas, parce que l’incongruité est trop grosse. Il y a une césure entre le peuple béninois et cette oligarchie rassasiée qui tente de lui faire avaler son produit français.


Dans ces conditions, c’est un boulevard tout ouvert aux autres candidats. Ajavon et Talon au Sud, ABT au Nord. C’est eux qui feront les élections en février prochain. A moins de débarquer le milliard dans chaque village pour acheter les votes, Lionel Zinsou est en simple promenade de santé. Malheureusement, s’il voulait des vacances, il pouvait vraiment trouver mieux.

Par Olivier ALLOCHEME

Source: L’evènement Précis

BENIN: Le mythe du messie
Tag(s) : #EDITORIAL
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