CHRONIQUE DU JOUR
La nouvelle carte de Nago
16 décembre 2008 - FRATERNITE
L’ordre du jour de la session parlementaire de ce jour a tout d’un événement puisque le président Mathurin Nago a enfin convoqué les députés pour la désignation des membres de l’Assemblée nationale qui vont siéger à la Haute cour de justice et dans les parlements régionaux. Un certain clan politique en difficulté mais toujours asservi au pouvoir avait fait de cette désignation une affaire taboue. La seule évocation du sujet excitait les nerfs et mettait des âmes en transe.
Nago a donc finalement invité ses collègues pour élire les six députés qui devront rejoindre les membres de la Cour constitutionnelle, excepté son président, et le président de la Cour suprême pour donner vie à la Haute cour de justice. Longtemps réfractaire à cette désignation, la cinquième législature et son chef ont péché contre la démocratie. Les chantiers politiques conçus sur des schèmes égoïstes obstruent et rendent évasifs des esprits exposés aux mouvements de masse. La non installation de la Haute cour de justice, institution constitutionnelle est imputable à l’Assemblée nationale enveloppée dans les faux fuyants. Mais comme Nago s’est enfin heureusement mais subitement et curieusement décidé à sublimer les ambitions politiques cauris, l’espoir peut renaître de ses cendres. Mais n’allons pas vite en besogne en empruntant les escaliers de l’apparence. La convocation de cette session parlementaire, si elle est encourageante, peut comporter les germes de l’illusion.
En accédant à l’une des revendications des G et F, le président Nago veut soigner son image. Il érige sa bonne foi en instrument de conquête de la confiance perdue et noyée dans les eaux de discorde à l’hémicycle. Mais la crise au cœur de la politique ne permet pas d’écarter naïvement la présence du père Noël au perchoir le mois de décembre : le cadeau de fin d’année, sous la forme de session consacrée à l’élection par l’Assemblée nationale tumultueuse de ses représentants à la Haute cour de justice, n’a pas encore révélé sa vraie nature. L’acte de convocation ne garantit pas le succès des échanges.
Le Palais des gouverneurs va certainement retrouver sa surchauffe classique qui soutient la tension. L’enjeu est de taille et ne manquera pas de faire culminer les querelles politiques. L’effet Abomey-Bohicon et le réflexe Fcbe commandité par l’influx d’affrontement augure du choc des intérêts.
La Haute cour de justice, nouveau champ de bataille des Cauris et anti cauris est par essence une institution de convoitise politique. La constitution lui confère le pouvoir de ``juger le président de la République et les membres du gouvernement à raison de faits qualifiés de haute trahison, d’infractions commises dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions ainsi que pour juger leurs complices en cas de complot contre la sûreté de l’Etat’’. (art 136).
De potentiels candidats à la Haute cour de justice peuplent la République pervertie par la corruption. Certains croupissent, à tort ou à raison, dans les prisons, attendant d’être jugés. D’autres agissent comme condamnés à comparaître un jour devant cette institution. Ministres suspects restent ce qui manque le moins. La lutte contre la corruption ressemble à une farce sans l’installation de la Haute cour de justice.
Cette cinquième législature, détentrice du record de blocage en une année, peut rebondir avec la désignation effective de ses membres à la Haute cour de justice et dans les parlements régionaux. Le président Nago portera en revanche la responsabilité historique de tout échec des désignations. Nago, encore Nago, malheureusement, il joue plus que jamais sa crédibilité ce jour avec sa nouvelle carte.