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Quelle voie d’issue pour la crise qui secoue

la profession pharmaceutique au Bénin

 

 

C’est un euphémisme que de dire que la profession pharmaceutique au Bénin est secouée par une grave crise dont les fondements méritent qu’on s’y penche pour en entrevoir une issue heureuse pour notre pays et ses populations qui sont autant de consommateurs du médicament.

La crise est depuis quelque temps transposée dans la presse et chacun a pu se faire une opinion

Actuellement il existe trois grossisteries pharmaceutiques privées qui sont fonctionnelles (GAPOB, UBPHAR, PROMO-PHARMA). Une autre, GBPHARM, a une licence active mais n’a pas présentement d’activité. La cinquième était SOPHABE devenu MEDIPHARM. C’est celle-ci qui a cédé sa licence à la nouvelle grossisterie UBIPHARM-BENIN. Cela a donné lieu à une mutation de ladite licence et conduit à la prise de l’arrêté qui a permis à UBIPHARM-BENIN de s’installer avec 76 actionnaires pharmaciens béninois représentant 72% du capital social. Les textes en vigueur exigent au moins 70% des capitaux aux mains de nationaux, ainsi que des dirigeants nationaux (PCA et DG notamment). UBIPHARM-BENIN est conforme à ces dispositions. Entre temps la nouvelle grossisterie a engagé près de trois (3) milliards d’investissements. Cet arrêté a ensuite été abrogé parce que l’avis formel et motivé de l’Ordre n’avait pas été requis avant la prise de l’arrêté susmentionné. UBIPHARM-BENIN a un accord de partenariat technique avec un groupe international, UBIPHARM INTERNATIONAL, à vocation de centrale d’achat et basé en France. L’argumentaire des grossisteries qui sont à 100% à capitaux béninois se base sur une suspicion de concurrence déloyale de la part de ce groupe international qui compte aussi parmi leurs fournisseurs, actuellement à hauteur de 20% de leur stock.

Le dernier épisode dans la crise consiste en la Conférence de presse du Conseil national de l’Ordre national des Pharmaciens. Cette sortie a eu l’avantage de montrer au grand jour qu’il y a un mélange de genres dans les rôles des différents types d’organisations de la profession pharmaceutique. L’Ordre est une institution de l’Etat ayant en charge de veiller au respect de la déontologie au sein de la profession pharmaceutique. Par contre, pour préserver et défendre leurs intérêts matériels et moraux, les pharmaciens du secteur privé se sont organisés en syndicat, le SYNPHAB. Cela est justement advenu au moment de la dévaluation du Franc CFA en 1994. Naturellement, avec les divergences d‘intérêts que couvraient les problèmes relatifs aux horaires d’ouverture et de fermeture des officines de pharmacie, un deuxième syndicat, le SIPHAB, s’est constitué, regroupant pour l’essentiel ceux qui pratiquaient l’ouverture de leurs officines 24 heures/24 et 7 jours/7. Ce qui confirme qu’on a affaire à des organisations de préservation d’intérêts matériels et moraux. Or la crise actuelle touche moins à la déontologie qu’à la conscience aigue de certains intérêts matériels et moraux au niveau des grossisteries et de leurs actionnaires qui sont des pharmaciens béninois qu’on retrouve de part et d’autre. Je me rends compte qu’en s’impliquant comme il le fait, le Conseil National de l’Ordre National des Pharmaciens dans sa composition actuelle peut à s’y méprendre être engagé dans la défense d’intérêts particuliers.

Comment situer alors les intérêts généraux ? That is the question !

Le Bénin est un pays capitaliste néocolonial. Dans le domaine pharmaceutique et thérapeutique, le système de santé est très lié aux opérateurs exportateurs français. La culture pharmacologique des médecins qui prescrivent est à ce point déterminante. On peut dire autant du réseau des délégués médicaux. A partir de ce tableau, on doit fonctionner selon certains principes et se fixer quelques critères pour appréhender les intérêts généraux du pays et ses populations.

1er Critère. Distinguer les grossisteries qui s’appuieraient sur une industrie locale pharmaceutique.

2ème critère. Distinguer les grossisteries qui feraient, en dépit ou même à l’encontre du tableau précédemment décrit, une politique de recherche de fournisseurs en vue d’avoir un prix grossiste à l’importation (PGHT – prix grossiste hors taxe) favorable aux populations.

3ème critère. Distinguer les grossisteries qui comporteraient beaucoup de capitaux nationaux ; critère du reste codifié à travers la part d’au moins 70% du capital social exigé pour les nationaux.

Quand on prend ces critères, on peut constater :

1. Que les anciennes grossisteries comme la nouvelle ne s’inscrivent pas au bénéfice du premier critère : elles sont toutes importatrices et revendeuses. Même statut, et il n’y a pas lieu de donner dans la surenchère nationaliste : les recettes équivalant au PGHT sont entièrement retournées aux fournisseurs étrangers ! Et puis, en examen de conscience l’industrie pharmaceutique locale (PHARMAQUICK) ne s’est pas vu dérouler, à son avènement dans les années 80, le tapis rouge pour l’encourager ; le dégel ne sera intervenu qu’à partir de 1999 au point où elle a pu être le sponsor N°1 du 1er Forum Pharmaceutique africain tenu en 2000 à Cotonou.

2. Des efforts du genre relatif au 2ème critère ont été faits : on a eu au lendemain de la dévaluation des produits ‘origine France’ ou ‘origine Maroc’, etc., mais ces efforts sont reproductibles par d’autres selon même le cours naturel de la concurrence. Tendance à la baisse des prix par conséquent. Mais ce qu’il y a lieu de craindre c’est le nombre de grossisteries se réduit à une seule au point de créer une sorte de situation de monopole pour une tendance à la surenchère sur les prix. En tout état de cause les officines de pharmacie sont assurées d’une permanence de livraison pour le bonheur des consommateurs, la pénurie en tel produit ou tel autre ne pouvant intervenir au niveau de l’ensemble des grossisteries. Que telle grossisterie cesse ses activités ou que telles autres fusionnent, c’est la loi de la concurrence capitaliste§

3. Par rapport au 3ème critère, la nouvelle comme les anciennes respectent la réglementation en vigueur concernant les 70% au moins en faveur des nationaux.

A l’examen de ces observations relatives aux critères retenus, il y a lieu de mettre la balle à terre et de laisser les 76 pharmaciens qui plus sont en majorité des jeunes exercer leur liberté d’entreprendre. A s’y méprendre ce sera un gage de santé et de vigueur pour la profession. Car la monotonie tue sûrement. C’est un avis qui est au dessus de la mêlée car provenant d’un des doyens qui plus n’est actionnaire nulle part !

Cotonou le 04 mai 2010

QUENUM Fidèle

Membre du Parti Communiste du Bénin

Pharmacien titulaire de la Pharmacie Generic Priority

Vice-président du SYNPHAB

Membre du Conseil d’Administration des Institutions sanitaires diocésaines

de l’Archevêché de Cotonou

Président entrant du COGES de la CAME

 

Tag(s) : #EDITORIAL
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