Absence de débats contradictoires sur nos antennes: La démocratie béninoise grippée
Le Béninois libéré 25 Septembre 2008
Eric TCHIAKPE
Le débat a réellement déserté le forum, il a pris la tangente même au regard de ce qui se passe sous le ciel du Changement. On peut tout reprocher au Président Kérékou, mais on ne peut pas le blâmer de n’avoir pas joué à fonds le jeu démocratique à un point on ne peut plus honorable. Aujourd’hui il est bien loin, le temps où le débat contradictoire avait cours sur la plupart de nos antennes. Le gouvernement Kérékou, après avoir instauré les points de presse hebdomadaires avec l’inénarrable Gaston Zossou, n’hésitait pas à envoyer au charbon ses ministres sur les médias pour expliquer, parfois dans un débat contradictoire, la position du gouvernement sur les sujets d’importance. La polémique ne manquait pas non plus. Comme Eclairage sur l’Ortb, Pour ou Contre sur Golfe Télévision et même la chaîne de télévision LC2 offrait des plateaux ponctuels qui ouvraient le débat sur les questions brûlantes de la Nation. Aujourd’hui, curieusement, plutôt que de profiter de ces lucarnes précédemment ouvertes, on assiste à la fermeture du débat par le pouvoir en place. Les déclarations quand elles ont lieu sur les questions d’actualités sont toujours unilatérales, et souvent dans le sens de la défense de la position du gouvernement. Les seules fois où la possibilité d’un débat contradictoire a abouti, l’expérience a très vite tourné court. Sur canal 3 Joel AÏVO du PRD, opposé au conseiller au Changement, Guidibi Edgar, qui de toute façon n’était pas la personne la mieux indiquée pour le sujet débattu à ce moment là. Ensuite, le ministre Hountondji opposé au même Joël AÏVO sur Radio Tokpa restent les seuls moments de réels débats autour de la gouvernance où la contradiction a été initiée. Pour le reste, sans que les sujets ne manquent pour autant, c’est la consécration de l’unilatéraliste dans l’arène politique. Les médias ayant presque tous été confisqués ou achetés pour faire l’apologie du parti au pouvoir.
Le traumatisme de l’expérience Aïvo
Se peut-il que l’expérience de la confrontation avec le jeune prodige du PRD ait laissé de profondes stigmates dans le camp de la mouvance qu'il se refuse de relancer les débats contradictoires ? Visiblement oui, au regard de ce que AÏVO a fait de ses différents contradicteurs. Or ce ne sont pas les cadres qui manquent dans cette mouvance susceptible d’apporter la rhétorique et la dialectique nécessaires pour soutenir les positions du gouvernement. Aujourd’hui, il ne fait aucun doute que ce manque de contradiction est à l’origine des frustrations qui ont raidi la position de ce que l’on peut appeler l'opposition. A cela, il faut ajouter le nombre de plus en plus grandissant de citoyens qui, aux prises avec cet unilatéralisme de fait, se confortent dans l’opinion que Boni Yayi n’instaure pas un débat sur les questions relatives à sa gouvernance. C’est l’ensemble de ces débats qui fortifient la démocratie et rassurent le citoyen qu’il a encore les rênes de sa destinée démocratique.