Le modèle demeure le Bénin
Par Arimi CHOUBADE
15 janvier 2009
Chorus autour d’Accra 2008. Une transition présentée comme l’une des plus propres du continent. Grâce dit-on à une commission électorale dont l’impartialité fait pâlir tous les acteurs politiques ghanéens et au-delà. Même le plus mondialement connu des Ghanéens, Koffi Annan, ancien Secrétaire général de l’Onu ne se contient plus de bomber le torse face à cette dignité retrouvée de sa nation autrefois pourvoyeurs de prostitués et de cireurs de chaussures pour toute la sous région. Il ne se trouve personne pour leur rappeler que jusqu’en 1995, toutes les élections s’organisaient par le biais de l’administration publique via les ministères de l’Intérieur réputés pour être des repères de zélés manipulateurs de listes électorales et jongleurs de bulletins de vote ; et que les Ghanéens ne connaîtraient peut-être jamais les délices d’une commission électorale indépendante si les suspicions légendaires de la Béninoiserie nées justement à l’occasion des préparatifs des législatives de 1995 ne l’a inventé. Le coup d’envoi des Cena, Ceni, Cen ou autres structures paritaires d’organisation des votes sur toute l’étendue du continent.
Passons la conférence nationale, la première en Afrique, en février 1990 à Cotonou. Que beaucoup d’autres ont essayé avec des fortunes diverses.
Occupons-nous du symbolique de l’alternance pacifique au pouvoir galvaudé à l’occasion de la succession de John Kufour. Kérékou a laissé son fauteuil à Soglo après un scrutin régulier en 1991. Le fait n’est certainement pas unique puisque Sassou au Congo, Kolingba en Centrafrique ont perdu des élections après des conférences nationales (après le Bénin). Mais le fait le plus rarissime reste le retour de Kérékou qui a battu son challenger Soglo candidat à sa propre succession. Atta Mills n’avait pas pour adversaire le président en exercice. De la même manière que les alternances soporifiques à la Malienne qui ne surviennent que lorsque le président en exercice a fini ses deux mandats constitutionnels au détour d’un rituel successoral presque prédéfini. En clair, c’est au Bénin seul qu’un président élu démocratiquement a perdu le pouvoir à la suite d’une élection après un mandat pourtant renouvelable. Ces détails de l’histoire du continent ont besoin d’un rajeunissement sans qu’on ne soit obligé de verser dans un chauvinisme nombriliste.
Mais l’œuvre dévastatrice de la démocratie enclenchée par le prince du Changement et ses sbires depuis 2006 jette un coup de noir sur ce modèle « toujours imité mais jamais égalé ». Le triste dessein ouvertement formulé par les émergents à travers le saccage programmé de tout l’héritage issu de la conférence nationale fait craindre l’imminence d’un cataclysme sur le Bénin. Il faut bien aller chercher le pessimisme dans l’instrumentalisation des institutions chargées d’arbitrer le jeu démocratique ; dans les violations répétées de la constitution et des lois de la République par un gouvernement pourtant issu du suffrage universel direct ; dans l’infantilisation de la société civile, des chefferies traditionnelles et des cultes religieux ; et non pas dans la tête d’un chroniqueur de médias désabusés.
Plutôt que de se gargariser sur la réussite d’une élection présidentielle, les dépositaires autoproclamés de la conscience africaine (Alpla Konaré, Abdou Diouf, Joachim Chissano, voire Soglo) ont mieux à faire en proposant un standard contraignant pour tous les pays africains – une sorte de constitution africaine avec des institutions arbitrales supranationales. Pour le dire crûment, une sorte de camisole de force pour ces négro-démocrates trop portés sur le clan, la famille ou la secte. Sinon la présidentielle du Ghana 2008 demeurera une éclaircie qui pourrait s’assombrir à tout moment comme au Kenya, en Mauritanie voire au Sénégal.
En attendant, pensez au cas du Bénin de Yayi, messieurs de la conscience africaine !