27 février 2009
Le Bénin en passe d’être une puissance agricole. Parce que « Boni 1er » a fait réceptionner quelques dizaines de machines agricoles. Des experts autoproclamés ont tôt fait de décréter une échéance : 2015 pour un pays vert dont les greniers regorgeraient de victuailles et d’abondance. Et la propagande de s’empresser de remettre son refrain du docteur pionner, premier en tout. Quelqu’un pourrait leur rappeler des historiettes de motoculteurs à l’instar de la dizaine de machines qui a failli mettre le feu à l’Assemblée nationale en 1993-1994 ? L’opposition à la Tévoédjrè s’était fait des gorges chaudes à propos de motoculteurs offerts par un partenaire au développement et qui auraient fait l’objet de clientélisme de la part du parti au pouvoir à l’époque, la Renaissance du Bénin d’une certaine Rosine Vieyra-Soglo.
Plus près, on se souvient du projet du gouvernement Kérékou sur la mécanisation de l’agriculture. A l’époque, l’ancien ministre Lazare Sèhouéto faisait rêver ses compatriotes par le truchement d’un mirifique projet de près d’une trentaine de milliards. Les amateurs du contact avec le pays profond connaissent très bien ces ornements de ferraille qui pavoisent les cours intérieures des hôtels de ville. Juste parce que les opérations d’introduction de machine dans les champs n’ont jamais été au-delà de la cosmétique et du populisme. Le Changement y a néanmoins apporté sa touche spéciale, la participation du chef de l’Etat en personne à une cérémonie de réception de ces ornements d’hôtel de ville. Tous les chemins mèneraient vers la réélection parait-il. Tout Béninois soucieux d’une compétitivité acceptable de l’économie nationale rêve de meilleures conditions pour les travailleurs de la terre.
Sans être un expert en la matière, l’échec des gadgets de propagande n’est plus à démontrer. Les paysans n’ont jamais pu s’approprier l’utilisation continue et à bon escient les machines agricoles expédiées dans leurs localités respectives comme des cadeaux de noël. Absence d’une maintenance qualifiée, nature du sol inappropriée, gestion défectueuse, émiettement des exploitations. Mais le plus grave c’est l’illusion de faire du Bénin une puissance agricole. 112.600 km2 environs face à un Nigeria, à une Côte d’Ivoire ou à un Ghana pour rester dans l’environnement immédiat explique que l’handicap est presque insurmontable. Il ne faut même pas comparer le Bénin à des pays-continents comme la Chine, la Russie, les Etats-Unis ou l’Inde.
Mais comment, les experts émergents n’ont pu se rendre à l’évidence que des machines dans l’agriculture nécessitent un préalable qui passe par la question de la collectivisation des terres. L’éparpillement des communautés sur l’ensemble du territoire béninois ne permet pas de disposer de vastes étendues contiguës afin d’y instaurer une agriculture intensive et compétitive. C’est ce qui explique l’importance de la réforme agraire sensée régler la question des terres cultivables. Une réforme qui en trois ans de régime de Yayi Boni n’est jamais sortie des bois malgré les promesses et les gesticulations. La mécanisation suppose l’apparition de grands exploitants nantis de capitaux colossaux. Des investissements qui ne peuvent prospérer dans l’insécurité législative qui caractérise aujourd’hui le monde paysan. Dans ce monde-là, le travailleur n’a aucun droit et n’existe que grâce à la seule volonté du propriétaire de la terre. Sans perdre de vue qu’une mécanisation équivaut à de l’emploi en moins pour des milliers d’humains. Un cultivateur aura moins besoin de main d’œuvre s’il avait la possibilité de se faire aider de la mécanique.
On ne le dira jamais assez, l’avenir du Bénin ne dépend pas d’incantations d’un leader, fut-il éclairé ou inspiré de l’évangile ou de tout autre livre saint. Ma petite intelligence me dit que moins que l’agriculture, les services, la communication, le tourisme pourrait aider à une émergence d’un aussi petit pays.
Encore faudrait-il que le choix se fasse autour d’une table à l’instar d’une conférence économique améliorée.