26 Février 2013
BENIN– CCIB : Yayi Boni va-t-il suivre « le yovo béninois » Gnonlonfoun et laisser mourir la CCIB d’hydropisie comme Judas Iscariote ?
Par Benoît ILLASSA
Selon James Freeman CLARKE, « La différence entre le politicien et l’homme d’Etat est la suivante : le premier pense à la prochaine élection, le second à la prochaine génération »
En proposant au Chef de l’Etat d’annuler purement et simplement le processus électoral en cours à la Chambre de Commerce et d’Industrie du Bénin, Joseph Gnonlonfoun ne pense pas à la prochaine génération mais, il se comporte plutôt en politicien irrationnel.« Nous avons estimé qu’il vaut mieux qu’on arrête les dégâts, que le gouvernement prenne ses responsabilités en demandant de reprendre l’opération en mettant les opérateurs économiques eux-aussi devant leur responsabilité » fulmine-t-il.
Alors président de la CENA (Commission Electorale Nationale Autonome), le même Gnonlonfoun dira, lors d’une cérémonie officielle à Cotonou le jeudi 17 février 2011 :
« Nous voulons que la campagne électorale 2011 ne se transforme pas en combat de gladiateurs. Et vous devez le dire à vos militants si tant est qu’ils combattent en votre nom pour une cause juste ». Il s’adressait aux candidats alors que des contentieux étaient signalés dans le processus électoral.
Pourquoi ce qui était bon hier ne l’est plus aujourd’hui ? A la CCIB, nous sommes en présence d’une élection consulaire. A la CENA, nous étions en présence d’une élection présidentielle. Parallélisme des formes oblige, le magistrat honoraire qu’est Gnonlonfoun doit expliquer au peuple béninois sa versatilité en présence de deux élections, certes différentes par leur nature, mais identiques selon les griefs des adversaires du processus.
A la CENA, le contentieux entre le pouvoir et l’opposition portaient essentiellement sur la Liste Electorale Permanente Informatisée (LEPI). Les partis de l’opposition dénoncent les fraudes dans la mise en œuvre de cet outil électoral. Selon l’Union fait la Nation et la coalition ABT, plus d’un millions de personnes n’ont pas été enrôlées et ne pourront donc pas voter. Ils n’ont jamais demandé l’annulation du processus électoral, mais plutôt son report.
A la CCIB, on rencontre les revendications identiques. Que le président de la Commission Electorale Consulaire (CEC) ne s’entende pas avec certains membres de la commission justifie-t-il la solution radicale de l’annulation ?
Bien sûr que non. La CENA et la CEC sont des organes indépendants chargés de la gestion transparente et efficace des processus électoraux. Affirmer que le Bénin sort d’élections fortement contestées avec la CENA est un secret de polichinelle. En effet, au contexte politique surchauffé et inapproprié au dialogue, s’est greffée la remise en cause constante et soutenue de chaque étape. Par ailleurs, les critiques étaient devenues progressivement très acerbes à l’endroit de la CENA aussi bien de la part des acteurs politiques, de la société civile que des citoyens ordinaires. Malgré tous ses soubresauts, la CENA des miracles a tenu bon avec son extrême politisation. Pourquoi refuse-t-on d’accorder le même bénéfice à la CEC ?
Gnonlonfoun nous assène que « Les représentants des opérateurs économiques qui siègent au sein de la Commission Electorale ont été désignés par le bureau transitoire de la CCIB alors que les nouveaux statuts indiquent qu’ils doivent être désignés par le bureau de la CCIB). Un des principes généraux du droit nous enseigne le principe de la non rétroactivité de la loi. De surcroît, c’est le serpent qui se mord la queue. Comment les membres de la CEC peuvent-ils être issus du bureau de la CCIB qui n’existe plus depuis belle lurette ? C’est justement pour pallier cette carence que les élections sont organisées. C’est ici le lieu de rappeler que le processus de désignation des opérateurs économiques par le comité transitoire a duré trois mois !
En réalité, Gnonlonfoun qui n’a procédé à aucune investigation, a seulement rencontré l’une des parties en conflit pour inciter le Chef de l’Etat à aller contre les intérêts du peuple béninois. Il a privilégié les intérêts partisans au détriment de l’intérêt général. On ne va pas séparer deux gamins qui se battent en giflant l’un d’entre-eux.
Yayi Boni ne doit pas faire siennes les recommandations de ce rapport controversé et édulcoré
Nous sommes partout à la traîne et, malheureusement, nous n’en sommes pas conscients. La France dont nous avons hérité les pratiques institutionnelles et judiciaires organise des élections consulaires dans chaque Département. Nous n’avons qu’une seule CCIB et nous peinons à la rendre viable à cause des intérêts égoïstes de certains compradore anti-développement.
En France, en dehors des aéroports et ports de Paris, tous les autres sont gérés par les Chambres de commerce. Les litiges entre commerçants sont réglés par les tribunaux consulaires, ce que nous n’avons pas au Bénin, malgré notre adhésion à l’OHADA. La création de ces tribunaux consulaires est pourtant indispensable pour désengorger les tribunaux ordinaires et accélérer les jugements pour une sécurité juridique sans laquelle aucun investisseur ne viendra miser sur le développement de notre pays.
Au Bénin, les journalistes, les pharmaciens, les architectes, les médecins, les avocats, etc. ont chacun leur ordre par un processus électoral qui fonctionne bien. Pourquoi les commerçants et hommes d’affaires béninois ne peuvent-ils en faire autant ? Faut-il comprendre que cela fonctionne bien chez les premiers à cause de leur niveau intellectuel élevé ?
Pour que renaisse la CCIB pour le développement du Bénin, chacun doit méditer sur cette citation de Montesquieu (De l’esprit des lois) :
« Le suffrage par le sort est de la nature de la démocratie. Le suffrage par le choix est de celle de l’aristocratie. Le sort est une façon d’élire qui n’afflige personne ; il laisse à chaque citoyen une espérance raisonnable de servir sa patrie »
IB