« Rien de grand ne se fait sans passion et enthousiasme ». Cette phrase anodine, mais pleine de signification est le leitmotiv de l’Association France Bénin football Plus (FBF+). Présidée par M. Jules Kodjo et agissant au Bénin depuis plus d’une dizaine d’années, FBF+ dispose déjà de quatre centres intégrés de formation dans notre pays. Convaincu depuis lors que l’avenir du football béninois se trouve dans la formation des jeunes, Jules Kodjo, au lendemain de la cuisante défaite des Ecureuils devant les Eléphants à Cotonou, persiste et signe dans sa philosophie. Au cours d’un entretien, il propose néanmoins des pistes très intéressantes
Comment se porte France Bénin Football Plus ?
Je vous remercie de vous intéresser à notre projet. Je vous assure que FBF+ se porte bien car c’est un projet multidisciplinaires qui repose sur trois piliers qui sont : le sport (football), la scolarité et l’outil informatique. Il est vrai que le contexte actuel ne nous favorise pas beaucoup pour motiver les jeunes, vu déjà l’état du championnat où ils se sentent exclus. L’avènement du professionnalisme auquel ils croyaient pour démontrer tout ce qu’ils ont appris n’a fait qu’augmenter leur amertume. Car le championnat regorge d’expatriés qui sont nos frères bien sûr, mais dans ce domaine, nous devrions construire notre football d’abord, lui donner une identité avant de l’ouvrir à l’extérieur. Alors, nos jeunes ont privilégié le deuxième pilier du projet et continuent leur scolarité au sein de leur cellule familiale dans de bonne condition. Nous sommes fiers d’avoir mis en place ce projet citoyen qui les met à l’abri des rêves sans lendemain.
Cela justifie-t-il l’accalmie dans vos activités ?
C’est vrai que la plupart des gens croient que nous ne faisons que du football. Le football est pour nous, un élément catalyseur qui permet aux jeunes de libérer leur énergie et de rester attentif et vigilant. Aujourd’hui, nous avons à travers le Bénin (Parakou, Savé, Lokossa et Akpro-Missérété), plus d’une centaine de jeunes qui poursuivent leur scolarité normalement.
Apparemment la crise du football béninois passe par là aussi…
C’est un élément à prendre en compte, et nous espérons que celle-ci trouvera bientôt une fin honorable pour le bonheur des amoureux du foot.
Votre avis sur ce phénomène de crise qui devient trop récurrent ?
A mon humble avis, ce phénomène ne date pas d’hier. Il faut trouver sa source depuis la dernière coupe d’Afrique en Angola, ou les personnalités se sont affirmées de même que les clans.
Effectivement il y a quelques mois, vous émettiez des doutes sur le bureau fédéral mis en place en août 2009
Il y avait un tel mélange des genres et d’intérêts que la mayonnaise ne pouvait pas prendre. Et comme dit l’autre, le terrain était bien miné. Il ne faut pas sortir de St Cyr pour le voir. Tout le monde le sentait, mais personne n’ose alerter les responsables sous peine de perdre leurs prérogatives. Comme quoi, les conseillers ne sont pas les payeurs.
Comme un devin, vos appréhensions se confirment aujourd’hui
J’aurais souhaité ne pas avoir raison, mais il y avait trop de conflits d’intérêts, et l’avènement du professionnalisme et son cahier des charges à la charge je dirais d’une seule et presque unique personne n’a pas arrangé les choses.
Que vous inspire cette déculottée des Ecureuils devant les Eléphants à Cotonou ?
C’était prévisible, mais cette défaite est très amère et interpelle tous les responsables à revenir à la raison. La jeunesse béninoise a du talent et elle ne demande qu’à s’exprimer dans un cadre approprié. Les Ecureuils, c’est l’arbre qui cachait la forêt.
Aussitôt après la débâcle, le nouveau ministre des sports a demandé la dissolution de l’encadrement technique. Est-ce suffisant ? si non, que faire ?
Je ne me permettrai pas de donner des leçons au ministre, et j’espère qu’il a les conseillers qu’il faut et surtout qu’il connaît la maison foot. Tout ce que je déplore, c’est que nos dirigeants ne se manifestent que lors des matchs qui impliquent les Ecureuils en oubliant les championnats et la formation des jeunes. En clair, le football béninois vit au rythme des Ecureuils et des intrigues. J’espère que les responsables mettront à profit ce repos forcé pour une refondation du football béninois, et permettre ainsi à notre jeunesse de poursuivre son rêve.
Que faire concrètement pour une sortie de crise véritable et définitive ?
Il y a bien une solution véritable, mais pas définitive. Elle n’est pas béninoise : « l’Intérêt Général ». A la dernière coupe du monde en Afrique du Sud, les joueurs français avaient créé l’événement dont tout le monde se souvient. La fédération française de football avait été tenue pour responsable et son président menacé de destitution par le ministère de tutelle. C’est alors que la FIFA a rappelé à la France les règles de non ingérence dans ses structures. Pour sauver son institution et éviter à son pays un bras de fer avec la FIFA, le Président de la fédération a seulement donné sa démission et c’est son adjoint qui finit son mandat et le prochain président sera élu courant Juin. A méditer…
A vous entendre, le salut du football béninois se trouve dans la formation des jeunes.
Mais, il existe pourtant des centres de formation sur le terrain. Le football est devenu un métier dont la formation est indispensable. Les centres de formation qui se créent un peu partout sont les bienvenus, mais tout ceci doit se faire sous l’égide des ministères de tutelle avec des agréments et affiliation à la fédération de football. Un cahier des charges adapté à nos moyens avec la participation de l’Etat serait un gage de fiabilité et de visibilité.
Quel peut être alors l’apport de FBF+ dans ce renouveau que vous entrevoyez ?
L’apport de FBF+ sera son projet qui a déjà été copié au Sénégal piloté par un de nos compatriotes. En Janvier 1999, j’ai été reçu par l’ancien Président de la République, le Gal Mathieu Kérékou, qui a trouvé après mon exposé que c’était un projet de portée nationale. Nous avons alors reçu un Accord de siège en bonne et due forme au ministère des affaires Etrangères… Notre ministère de tutelle n’a pas suivi. Ainsi va le Bénin.
Après plus d’une décennie d’actions sur le terrain, on a du mal à percevoir les résultats de FBF+
Nous pouvons être fiers de notre apport à la jeunesse du Bénin. Ils sont plus d’une centaine qui poursuivent leur scolarité dans les lycées et collèges, ainsi que dans les facultés du Bénin. Deux d’entre eux ont bénéficié d’une bourse « ALSTOM » et sont en Sports Etudes en France à Belfort dans un lycée. Les résultats scolaires sont bons et ils font la joie de leur club les dimanches dans leurs différents championnats. Quand à Jean-Marie Guéra, il a quitté Parakou pour poursuivre ses études à Porto-Novo ou il fait le bonheur de son club Asos à Porto comme il dit. C’est déjà encourageant, même si nous avons envie de faire plus.
Quels sont alors les nouveaux défis de FBF+ ?
Nous n’avons pas déserté le terrain. Nous venons de négocier un accord de partenariat avec un grand hôtel de la place à Cotonou au bord de la mer. Il met à notre disposition des bâtiments pour nous permettre d’installer notre « Académie ». Cependant, nous insistons pour dire que l’Intérêt Général sera la solution de la crise.
Réalisé par Pascal Hounkpatin