Lettre ouverte à la Haac suite à l’interdiction de certains journaux de la revue de presse sur les radio et télévisions
A Mesdames et Messieurs de la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication.
Mesdames et Messieurs,
Depuis la conférence nationale, le Bénin est apparu comme un sanctuaire de la démocratie. Souvenons-nous qu’il était perçu en Afrique au premier rang du combat pour les libertés. Mais à quoi avons-nous assisté depuis avril 2006 ? Au spectacle d’un président en campagne permanente, auteur unique du travail de la communauté, mais ne sachant rien des errements, des fautes et crimes commis sous son autorité, un saint homme de président en somme. Sur quatre longues années, nous avons été les témoins du spectacle douloureux de groupuscules abêtis par l’argent demandant la réélection de cet homme-là. Quoiqu’elle nous paraisse malsaine, au nom de la liberté d’opinion, nous avons toléré la manœuvre. Cependant, nous espérions que les neuf mois à venir seraient le temps du bilan et de la vérité des faits, celui des réponses claires à des questions précises. Nous voulons savoir et le peuple doit savoir, et cela ne peut se faire que par l’intermédiation de la presse :
quand nous exhibera-t-on, en un lieu convenu, un spécimen de l’imperméable de corps acheté à 400. 000 FCFA ?
quels sont, nommément, les bénéficiaires des exonérations en milliards de francs CFA accordées à des hommes et femmes d’affaires dans le cadre de la CEN-SAD ?
quand apportera-t-on une contradiction claire et responsable aux affirmations d’un député sur la surfacturation surréaliste en rapport avec l’acquisition de machines agricoles ?
est-ce vraiment la même infrastructure routière reliant l’aéroport de Cadjèhoun au marché Ganhi, et précédemment évalué à moins de 4 milliards de FCFA, qui a été concédée à un entrepreneur dans un marché de gré à gré, à près de 13 milliards de francs FCA ?
Quand répondra-t-on à d’autres questions encore que le peuple posera, et ceci peut-il se faire avec une presse bâillonnée ? Nous sommes maintenant au temps des propositions alternatives, celui de l’expression libre pour tous, sous votre souverain et honnête arbitrage. Mais ce temps, mesdames et messieurs, est celui que vous avez choisi pour trahir votre mission, et entreprendre de museler la presse et le peuple, de les interdire de parole, et de les maintenir sous la domination d’un régime de corruption inégalée et de sectarisme primaire. Comment pouvez-vous vous sentir en paix avec votre conscience de femmes et d’hommes, de citoyennes et de citoyens, en vous mettant dans le rôle où vous vous trouvez maintenant ? N’êtes-vous pas honteux de démolir, pour des rentes, les bases de notre démocratie, d’infliger au peuple un sentiment d’injustice préjudiciable à la paix et à la concorde nationale ? Pensez-vous que vous avez le droit de vous laisser inféoder à l’Etat-FCBE (Faillite des Compagnons Béninois pour l'Emergence) liberticide et corrompu ? Avez-vous une conscience si confuse de votre responsabilité d’institution de régulation et de contre pouvoir ?
Vous devriez promouvoir l’expression libre, juste et équitable, mais vous voilà en train de bâillonner la presse et le peuple, afin de le conduire les yeux fermés à l’abattoir encore. Mais sachez, dès à présent, que vous avez en face de vous des concitoyens résolus à engager et à mener une lutte farouche contre vous et vos très illustres commanditaires de l’ombre. Nous ne vous laisserons pas saper en cinq années de règne l’ouvrage de plusieurs décennies de sacrifices du peuple. Nous attendons de vous de faire repentance et de rendre à la presse et au peuple les libertés que vous avez tenté sournoisement de leur voler. Nous avons besoin des libertés pour instaurer une meilleure gouvernance et bâtir un pays prospère.
Mesdames et Messieurs, votre décision en date du vendredi 18 juin 2010 porte un coup dur à la démocratie, c’est un attentat à la raison d’être du métier de journalisme, à la liberté d’expression et aux libertés de vos concitoyens. L’essence du métier de journaliste est d’informer, c’est-à-dire de rapporter, par des moyens convenus, les faits survenus et les propos tenus par les uns et les autres dans le strict respect de la déontologie du métier. Louis Hounkanrin, Tovalou Houénou Quenum, Augustin Azango, et vous autres, vaillants combattants de la liberté, du séjour des morts, faites que vos grandes âmes planent sur le Bénin et restaurent l’espoir.
Fait à Cotonou, le 20 Juin 2010
Pour le Comité de Sauvegarde de la Démocratie
Professeur Firmin Antoine Wingnonsa HODE