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10 juin 2011

 

BENIN: OPPOSANTS BÉNINOIS, VOUS SEREZ JUGÉS COUPABLES DE NON ASSISTANCE A MÈRE PATRIE EN DANGER

 

 


Aucun tyran – aucun tyranneau encore moins – n’est grand par lui-même. S’il paraît grand, c’est uniquement parce que face à lui, ses concitoyens se mettent systématiquement à genoux. Je ne sais plus quel auteur avait dit ça. Ce que je sais, c’est que ce n’est pas exactement la lettre de ce qu’il avait dit. Pour l’esprit, par contre, pas de souci : c’est exactement ce qu’il avait voulu dire.


Ceci pour dire que les Béninois ont des raisons d’avoir des doutes, de plus en plus sérieux, quant à la qualité et à l’engagement réel pour la démocratie de certains animateurs de la classe politique. Car enfin, voilà le pays qui a inventé le concept de la Conférence nationale, et qui se targuait d’être le Laboratoire de la Démocratie sur le continent, qui se retrouve relégué au rang de petite République bananière, suite à une élection présidentielle, dont le caractère frauduleux (et crapuleux) est de notoriété publique à l’intérieur du pays et même au plan international !... Il n’y a en effet plus que les yayistes qui sont « nés avant la honte » – comme on dit au Gabon (merci à Nick Ahounou pour cette info) –, qui essaient de se persuader qu’une élection sans liste électorale, sans liste de bureaux de vote clairement localisés, avec plus d’un million d’électeurs potentiels délibérément laissés en rade, qu’une telle élection est une élection digne d’un pays civilisé. Ce sont ces mêmes yayistes « nés avant la honte », qui essaient de se persuader – et de persuader les derniers abrutis du pays – que les contestations post électorales réprimées avec une sauvagerie inouïe, la militarisation post électorale de la capitale et de quelques grandes villes (avec soldats armés jusqu’aux dents et chars d’assaut menaçants), la censure systématique des émissions de RFI toutes les fois que lesdites émissions ont été jugées dérangeantes par le régime, que de telles pratiques sont des pratiques dignes d’un pays civilisé.


A la tête de cette République fraîchement bananière, un « président » aussi illégal qu’illégitime qui, au nom d’une prétendue Refondation, concept invertébré qui fait suite à l’échec patent (non assumé) de son concept précédent (le Changement), pose des actes qui ne sont, ni plus ni moins, que des actes de despote :


- Humiliation publique d’un ministre de la République (en la matière, c’est même un multirécidiviste chevronné),


- Annulation-surprise sans la moindre explication, la veille de sa tenue, d’un Forum auquel étaient invités des étrangers, ceux-ci déjà présents pour la plupart, sur le sol national,


- Limogeage soudain, le même jour et par paquets, sans aucun décret pris en conseil des ministres, de tous les Conseillers et Chargés de missions de la présidence de la République,


- Limogeage au petit bonheur la chance, des directeurs d’Offices et de Sociétés d’Etat, dont ceux encore en place, se savent sur un siège éjectable dont le mécanisme déclencheur est déjà positionné sur le bureau du Prince, n’attendant que son bon vouloir,


- Nomination comme ministres, d’individus notoirement abjects (Nassirou Bako-Arifari) ou éminemment suspects (Max Awèkè),


- Nomination à la tête de la CPS LEPI (poste ultra sensible s’il en est, générateur d’un profond traumatisme pour les Béninois), nomination donc de Dame Hélène Aholou Kèkè, personnage plus douteux encore que le sieur Awèkè,


- Cette liste n’est, hélas !, pas close…


Et comme toujours en pareil cas sous tous les cieux – mais surtout sous les cieux béninois – nombre de ceux qui étaient prêts à couper la tête du despote la veille ou l’avant-veille, se mettent en rang d’oignons, pour lui chanter qu’il est le plus beau, le plus grand, le président à la fois le plus lumineux et le plus éclairé de tout l’univers.


Il y a décidément – et toujours – des coups de pied au cul qui se perdent (Mes excuses aux personnes sensibles).
En tout cas, dans un schéma normal, dans un pays normal, on se serait attendu à ce que les derniers démocrates encore intacts – qui, comme candidats, qui, comme figures marquantes de l’opposition, dénonçaient il y a peu, sur tous les tons, la mise à mort de la démocratie –, s’organisent avec célérité et méthode, pour faire entendre leur voix, pour dénoncer les actes du despotisme désormais envahissant, pour rassurer le peuple que sa démocratie a encore des défenseurs intrépides et résolus, et qu’il n’y a pas lieu pour lui (le peuple) de se laisser envahir par l’accablement ni par le découragement.


Las !, dans le schéma béninois, les démocrates encore intacts du pays, donnent l’impression de s’être tous mis aux abonnés absents. Et personnellement, j’ai trouvé tout à fait surréaliste et accablant que le vainqueur virtuel des dernières présidentielles, Maître Adrien Houngbédji – si convaincu de sa victoire que le juriste pointilleux qu’il est, n’a pas hésité à s’autoproclamer président élu – en soit réduit à être sur la défensive, objet de rumeurs et d’insinuations les unes plus malveillantes que les autres. En soit donc réduit à publier un communiqué dans le genre pleurnichard, pour réfuter les informations distillées ici et là, selon lesquelles, il serait en train de migrer vers l’usurpateur de son fauteuil de président, pour négocier des postes pour ses partisans, après s’être fait rembourser ses frais de campagne. Affligeant...



Je l’ai dit plus haut, les Béninois ont des raisons d’avoir de plus en plus de doutes quant à la qualité et à l’engagement réel pour la démocratie de certains animateurs de leur classe politique, après qu’ils ont mis à part les charlots méprisables et autres retourneurs de veste éhontés, qui sont devenus soudain plus yayistes que Yayi lui-même, alors qu’il y a quelques semaines encore, ils n’avaient pas de mots assez durs pour dénoncer, pêle-mêle, autocratie, prévarications, incompétence et inaptitude à diriger un pays.


La chose est même en train de prendre des proportions dramatiques. Car enfin, pour ces responsables politiques, qui ne se sont pas encore mis à l’exercice de la danse du ventre, voir leur pays – inventeur du concept de la Conférence nationale et réputé Laboratoire de la Démocratie en Afrique – ravalé au rang d’une quelconque Républiquette bananière, devrait être pour eux un spectacle aussi insoutenable qu’inacceptable. Et tous les actes attentatoires à la démocratie et à la dignité du pays, posés par les tenants de la Républiquette, devraient faire l’objet de réactions immédiates et cinglantes, dans le cadre d’une stratégie de communication réfléchie et sans concessions. Puisqu’ils le savent très bien, ces messieurs dames que, comme a dit quelqu’un, mi-sérieux mi-rigolard, la démocratie est à l’inverse de la pub des piles Wonder d’une certaine époque : « ELLE NE S’USE QUE SI L’ON... NE S’EN SERT PAS !... »


Je sais qu’on me répondra que Boni Yayi a tout verrouillé, qu’il a toutes les Institutions de la République à sa botte, et qu’il est impossible de se faire entendre ou de faire quoi que ce soit. Et je suis tenté de répliquer, en demandant où ils étaient, ces animateurs de la politique nationale, quand tout ceci se mettait en place ; car, ce n’est tout-de-même pas du jour au lendemain qu’un inconnu et novice de la scène politique, a réussi sa mainmise absolue sur le pays, au nez et à la barbe d’eux tous ; eux, les vieux routiers de la politique ; qui se vantaient volontiers de ce statut de vieux briscards. Je suis tenté de demander cela mais, de toute évidence, c’est un autre débat. Un débat totalement inopportun aujourd’hui. Pour l’heure, qu’on me permette de m’insurger contre ce défaitisme aussi peu sérieux que lamentable, de la soi-disant mainmise absolue sur le pays. Ceci parce que :


1 – Boni Yayi ne peut avoir soi-disant tout verrouillé, au point d’obliger tout un peuple et sa classe politique, à assister à la liquidation en règle de la seule richesse, la seule chose qui leur permettait de faire entendre la petite musique de leur pays dans le concert des Nations, la seule chose qui leur permettait, aux Béninois, de bomber le torse partout au monde : la démocratie.


2 – je ne crains pas de dire qu’il y a d’autant plus de raison de se battre que cette bataille paraît à priori impossible : c’est en effet une bataille pour la Mère Patrie… La bataille pour laquelle aucun sacrifice n’est suffisamment grand !!!... D’ailleurs, l’enjeu est si important (la sauvegarde de si précieux acquis démocratiques) qu’il est aussi incongru qu’incompréhensible de tenter d’avancer des raisons de ne rien faire.


3 – Et puis, merde ! (Mes excuses renouvelées aux personnes sensibles), si on escamote toutes les autres questions qui fâchent, et qu’on retient qu’en 2006, c’est ni plus ni moins le diable qui est entré dans la maison Bénin, peut-on continuer d’escamoter cette question-ci : « Qui est-ce qui a fait entrer le diable dans la maison ??? » Est-ce que ce n’était pas eux, les vieux briscards, qui manquèrent de vigilance et de lucidité en 2006, à un point tel qu’ils firent le choix d’un « inconnu » et le firent, assez imprudemment, entrer dans la maison ?...


Cet « inconnu » étant à présent en train de saccager méthodiquement tout ce qui a été bâti dans la maison, au prix de lourds sacrifices pendant des décennies – sacrifices dont il semble n’avoir aucune idée, et pour lesquels il n’éprouve naturellement aucun respect –, est-ce que ce n’est pas un devoir moral, mieux, est-ce que ce n’est pas un devoir historique pour eux, les vieux briscards, de s’organiser de façon impérative et au plus tôt, pour trouver les moyens de sauver ce qui est encore sauvable ?...


Je sais que certains parmi eux ont déjà du mal à se regarder dans une glace. Mais il y a plus grave pour eux : ce sont eux-mêmes que regarde à présent l’Histoire du Bénin. Et ce regard est un regard implacable. Ce regard qui leur dit qu’ils sont en train de ne rien faire de tangible ni de cohérent, au moment où ce pays qui leur a tant donné, a besoin de ses enfants les plus pétris d’expérience et les plus lucides ; alors même qu’il (ce pays) se trouve aux mains d’amateurs, d’aventuriers politiques aidés d'apprentis-sorciers, qui semblent être tous devenus fous.


En tout état de cause, le chef d’accusation devant le Tribunal de l’Histoire sera sans équivoque : "Non assistance à Mère Patrie en danger".


C’est ce que je crois.

TLF

 

 
 
 
 
Tag(s) : #EDITORIAL
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