Bon Dieu bon
22/01/2010
Qu’il pleuve ou qu’il neige, les Haïtiens, nos cousins, disent «Bon Dieu bon». Que les cyclones s’abattent sur leur île rocheuse ou que la guerre éclate, «Bon Dieu bon» ! Est-ce de la fatalité ou de l’optimisme ? La question a son mérite. Symbole dans l’histoire de l’humanité de révolte réussie par des esclaves noirs avec Toussaint Louverture en tête, Haïti n’a pourtant pas réussi à développer sa nation dans la paix autant que la République Dominicaine voisine qui occupe avec elle l’île Hispaniola. Cette première République noire depuis 1804, cette terre où le Vaudou et le Christianisme ont poussé des racines profondes, demeure donc une intrigue. Et comme pour avoir une raison supplémentaire de ressembler aux Béninois leurs ancêtres, la conscience collective des Haïtiens est aussi marquée par une malédiction. Celle que Jean-Jacques Dessalines, premier président, aurait prononcée avant de succomber au guet-apens manigancé contre lui par les mulâtres et les noirs.
Malgré toutes les explications géologiques, les prospections sismiques et les improvisations politiques, Haïti n’avait pas besoin d’une catastrophe supplémentaire. Mais «chut» à toutes les vues fatalistes, qu’elles soient de veines rationalistes ou de sources mystiques. Tous les blessés de la terre et les possédés de l’esprit n’ont pas meilleur diable à craindre que l’enfermement dans le cycle du cynisme de l’impasse et du pessimisme. La foi en un Bon Dieu bon ouvre aux ressources de l’espérance pour donner à la résilience de l’esprit humain la force de la responsabilité. Et ce, en Haïti et en chacun de nous. Quelqu’un d’autre connaîtrait-il un meilleur chemin ? Qu’il s’avance donc.
Du temps de la Guinée révolutionnaire, nos pères dans la foi, de la sous région, avaient envoyé des missionnaires courageux comme Mgr Robert Sastre et la Sœur Saturnine Alapini en terre de martyr ! Plus que l’argent et les déclarations de circonstance, Haïti réclame non moins que nous-mêmes. Haïti en ruine est pour notre génération un défi de réponses personnelles et collectives aux catastrophes géologique, intellectuelle, politique, morale et religieuse de toutes les nations noires ou pas, en mal de construction.
Ô Bon Dieu bon !
Abbé André S. Quenum
Source: La Croix du Bénin