30/10/2011
Primaires Socialistes:
Le Système et Martine AUBRY
Par Faustin AÏSSI
Résultats et Analyse
Finalement, François Hollande l’emporte sur Martine Aubry, 56,6 % contre 43,4 %. Résultats logique puisqu’un second tour, Martine Aubry s’est retrouvée toute seule contre tous
. Et pourtant, nous avions cru qu’entre Manuel Valls et Arnaud Montebourg, les candidats se revendiquaient de droite à gauche, les moins à gauche étant par ordre croissant Valls, Baylet et François Hollande, les plus à gauche étant Royale, Aubry et Montebourg, ce dernier ayant carrément occupé la place qu’aurait occupé un Emmanuelli ou Benoît Hamon. Le capital potentiel de pourcentage de voix dont disposait François Hollande de part ses soutiens était d’un peu moins de 70 % contre un peu plus de 30 % à Martine Aubry. En obtenant que 56,6 %, François Hollande face aux 43,4 % de Martine Aubry, l’écart potentiel de 30 points plonge drastiquement à quelques 13 points de différence sur la base des résultats du second tour. Indiscutablement, en dehors de la légère augmentation des votants qu’on peut penser favorables à Aubry, beaucoup d’électeurs de Montebourg n’ont pas suivi leur leader du premier tour dont le discours s’accommodait mal avec les idées développées par François Hollande que les observateurs les plus avertis classait plutôt au centre droit, en tout cas plus à droite que Martine Aubry.
On peut donc légitimement penser que les électeurs de Montebourg se sont beaucoup plus répartis au second tour sur Martine Aubry, une partie d’entre eux s’étant probablement abstenus ou ayant voté nul.
Installation d’un «système» politico-médiatique
Je fais partie des gens qui pensent que le système politico-médiatique a toujours désigné
par des matraquages de sondages «bidons» ou pour le moins peu sérieux celui des socialistes qui arrange le mieux le système mondialisé ou sera le plus son porte-parole à gauche en ce sens que non seulement il veillera à bouleverser le moins possible l’ordre établi mais qu’il présente le profil le plus facile à confondre par le candidat de droite puisque les politiques proposées seront si peu différentes que le peuple de gauche ne s’y retrouvera pas alors qu’au contraire, les électeurs de droite pourront se satisfaire d’un changement de gouvernement dès lors qu’ils ont l’assurance qu’il ne remettra pas fondamentalement en cause l’ordre établi. Il y a cinq ans, le système politico-médiatique avait mis son dévolu sur Ségolène Royal
qu’il a présenté comme la favorite des sondages pendant neuf mois pour la flinguer dès le lendemain de sa désignation par les militants socialistes. Pour mieux la faire battre par le candidat de droite Sarkozy, le système a trouvé des socialistes dont certains non seulement l’ont trahie mais de plus certains leaders socialistes n’avaient même pas fait campagne pour elle. On ne pouvait donc pas s’étonner que certains d’entre eux se soient retrouvés dans les différents gouvernements de Sarkozy.
Le même système nous avait matraqués des mois durant par voie de presse et désigné DSK favori des sondages
pouvant seul battre Sarkozy avant que ce dernier ne se fasse exploser en plein vol, tellement il s’était cru arriver qu’il pouvait se montrer en «voiture de luxe dernier cri», narguer avec son air hautain tout le monde voire se permettre des légèretés que seuls les «dominants» pouvaient s’autoriser puisqu’ils sont assurés de l’impunité de par leur puissance monétaire surtout face à une femme de chambre, de plus «Noire» ou d’une journaliste dont la Famille n’est pas dans la cour des «puissants». Les fils du piège tendus aux socialistes se dénouent devant nos yeux
. Avec l’affaire de l’hôtel Carlton de Lille avec ses relais parisiens et new-yorkais où on se rend compte que la police est dans le coup avec des commissaires mis en examen, voudrait-on nous faire croire que le ministère de l’intérieur et l’Elysée n’étaient pas informés, que tous ces éléments n’allaient pas être livrés en pâture lors de la campagne électorale pour déstabiliser le candidat socialiste si c’était DSK et assurer la réélection de Nicolas Sarkozy? DSK disparu
, qu’à cela ne tienne, il fut remplacé aussitôt par François Hollande, l’ambitieux qui a toujours rêvé, nous dit-on aujourd’hui, d’être Président de la République depuis l’enfance. Etait-ce un hasard que Jacques Chirac déclare préférer voter Hollande aux présidentielles? Pendant tout l’été, il fut bombardé «favori des sondages» le plus capable de battre Sarkozy alors que le pouvoir de ce dernier est tellement à terre que n’importe quel socialiste aurait pu le battre dans quelques mois. L’Histoire bégaye-t-elle?
Le lobby politico-médiatique sait choisir ses candidats de gauche car François Hollande présente quelques parcours familiaux pouvant ressembler à son maître François Mitterrand. Si ce dernier a découvert la gauche après un parcours de droite dans ses jeunes années, accessoirement pétainiste médaillé de la «francisque», c’est le père de François Hollande qui était ouvertement d’extrême droite s’étant même présenté à des élections sous ce label («Le Nouvel Observateur 1ère semaine de septembre 2011»). Tel père, tel fils? Pas forcément car un fils ne suit pas forcément les traces de son père mais n’en reçoit pas moins l’éducation et surtout baigne forcément dans une culture familiale. Entre une Martine Aubry-Delors dont le père Jacques a été une figure emblématique du parti socialiste et un François Hollande dont on découvre par hasard le parcours familial, la gauche aurait été plus inspirée et mieux honorée si son porte-drapeau était imprégné culturellement dans une tradition familiale de gauche.
Les journalistes de la télévision ayant tu l’information pendant toute la durée de la campagne des primaires l’ont ressortie le soir même des résultats du second tour au 20 h de France 2
. Même en étant à Alger le soir du deuxième tour, cette information ne m’avait pas échappé. Est-ce le ton de la campagne du premier tour qui aurait commencé? François Hollande pourra-t-il franchement regarder les yeux dans les yeux Nicolas Sarkozy pour lui reprocher d’avoir installée les idées d’extrême droite à l’Elysée ou tancer vertement Marine Le Pen
sur ses propos racistes et xénophobes sans se voir renvoyer à la figure que son père et le sien fréquentaient les mêmes milieux et autres eaux troubles pendant l’occupation et les années soixante? . L’histoire enregistrera que celui qui a toutes les chances de devenir le second Président de gauche de la République Française aura une famille ayant un parcours similaire à François Mitterrand dont la culture libérale de jeunesse aura beaucoup pesé dans la signature du traité de Maastricht.
Il existe bien un système politico-médiatique libéral
Même Martine Aubry a fini par s’étonner de la «sainte alliance» contre elle
et s’est vue reprocher d’en avoir parlé, un des lieutenants du favori des sondages Moscovici montant au créneau pour la tancer d’utiliser le terme «système», d’utilisation apparemment réservée à l’extrême droite selon lui. Au fond, on s’interrogera toujours sur ce qui pourrait amener cinq des 6 candidats à se liguer contre la dernière qui de plus est la 1ère Secrétaire en charge du projet socialiste
.
Pourquoi les quatre autres candidats non qualifiés ont-ils reporté comme un seul homme leurs voix sur le candidat favori des sondages finalement adoubé qui n’a jamais vraiment pris à son compte le projet socialiste? Ne s’acheminerions-nous pas dans la même direction que les deux premières années de pouvoir de François Mitterrand avec de bonnes déclarations d’intention rapidement enrayées par la parenthèse libérale de 1982 jamais fermée qui nous a conduits au traité de Maastricht dont nous subissons encore aujourd’hui les dégâts? Comment Montebourg qui prétendait représenter la gauche du parti socialiste peut-il se rallier au plus à droite des deux principaux candidats qu’étaient la 1ère Secrétaire Martine Aubry et François Hollande, le candidat du lobby politico-médiatique?
L’on ne peut avoir qu’une seule réponse et explication: l’intelligent Montebourg a profité de l’absence de la gauche du PS représentée par Benoît Hamon et Henri Emmanuelli pour occuper cet espace et se faire un nom. Le PS aura réussi à écœurer les militants qui sont à gauche du parti en les amenant à quitter la maison commune les uns après les autres: Jean-Pierre Chevènement avant-hier, Mélenchon hier. Qui demain?
Finalement, pour avoir fait 44 % des suffrages, les militants PS montrent comment ils résistent encore et toujours à la «droitisation» de leur parti
car disposant d’un capital de 39,4 % des voix au 1er tour auxquelles il faut ajouter les 30 % de celles des quatre autres candidats qui l’ont rejoint, François Hollande n’a récupéré que quelques 17% pour obtenir ses 56,4 % au deuxième tour. Aussi les 44 % des suffrages obtenus par Martine Aubry doivent pouvoir être le socle de résistance de la gauche à la mondialisation à partir duquel une vigilance constante s’exercera pour éviter une éventuelle dérive du pouvoir de François Hollande.
En effet, François Hollande sera très sensible
Martine Aubry ne pouvait donc pas gagner dès lors que l’élection était ouverte à près de 3 millions de votants
alors que le PS comptait moins de 150.000 adhérents surtout qu’il m’a été rapporté comment le dimanche du second tour des centaines de SMS ont été envoyés à des militants UMP du Nord d’aller voter pour François Hollande. Martine Aubry ne pouvait pas gagner dès lors que tous les «cumulards» socialistes
comme les Présidents des groupes PS à l’Assemblée Nationale et au Sénat, Jean-Marc Héraut et Jean-Pierre Bel, ou les locaux que sont les Jack Lang, Michel Delebarre, Bernard Roman, Daniel Percheron et autre Bernard Derosier, se sont portés comme un seul homme sur François Hollande. Pourtant,
tout en étant conscient de toute cette analyse, j’ai été un des premiers, pour ne pas dire le premier, à militer au sein de Rassemblement Citoyen (un mouvement politique conduite par Gérard Caudron, maire de Villeneuve d’Ascq et ancien député européen) pour non seulement participer aux primaires des socialistes mais à voter pour Martine Aubry ayant déjà perçu ces enjeux et cet objectif du système politico-médiatique de nous placer son candidat social libéral alors même que mes convictions européennes auraient du me conduire à voter Arnaud Montebourg. La décision de ce dernier d’appeler à voter au second tour pour le candidat du système, non pas par conviction selon ses propres dires la veille du second tour dans le journal Le Monde du Samedi 18 Octobre, m’a conforté dans mon analyse avec cette anticipation à pressentir les comportements et de demander à porter nos suffrages sur Martine Aubry pour mieux contenir le candidat du favori du système François Hollande. Pour autant, je peux dire aujourd’hui que je ne voterai pas Hollande au premier tour des élections présidentielles de 2012 même si au moment où j’écris ce texte, je l’écoute sur la chaine parlementaire LCP prononcer son discours d’investiture très bien construit par ailleurs.
Il ne faut pas penser que je serais un mauvais joueur en n’acceptant pas la règle du jeu de soutenir le vainqueur des primaires socialistes. Certains militants de gauche ont décidé de participer à ces primaires parce qu’ils auront à choisir au second tour des présidentielles entre la droite et la gauche, une gauche dure de préférence et non «molle» représentée par François Hollande. Je porterai mon choix sur Jean-Luc Mélenchon, Président du Parti de Gauche
dont je me sens beaucoup plus proche aujourd’hui, qui portera la candidature commune Front de Gauche, l’Humain d’abord, lors des prochaines élections présidentielles. J’invite mes amis politiques, mes camarades de route et plus largement les électeurs de gauche à opter pour ce choix
car c’est maintenant que la seconde bataille s’engage si nous voulons vraiment peser sur le futur gouvernement de François Hollande qui sera truffé de sociaux-libéraux «Strausskahniens». Il ne vous aurait pas échappé que le «fameux deal» de Dominique Strauss Kahn avec la 1ère Secrétaire du PS aurait conduit, après son malencontreux effacement de la scène politique, à l’alignement de ses principaux mentors comme Moscovici et autre Leguën non pas sur Martine Aubry mais sur le social-libéral François Hollande démontrant ainsi la perversité de celui que ses aventures hôtelières de Sofitel de New York ou de Carlton lillois auront montré combien il était et est malhonnête et menteur.
En effet, il faut que le score obtenu par la vraie gauche portée par le candidat du Parti de Gauche et du Parti Communiste Français Jean-Luc Mélenchon soit suffisamment fort pour que la gauche de gouvernement puisse prendre en compte les exigences populaires et mener une véritable politique de gauche
. Je fais remarquer tout de suite qu’on ne nous taxe pas de vouloir faire passer à nouveau la droite car nous ne serions pas dans la situation de 2002 où un Front National même fort sera susceptible de conduire à l’absence de la gauche au second tour. En effet, tout le monde aura observé qu’avec la participation du Président du parti radical de gauche (PRG) aux primaires du parti socialiste, une candidature du PRG aux élections présidentielles de 2012 est exclue et on n’assisterait pas au cas de figure des 200.000 voix manquant à Lionel Jospin pour sa qualification en 2002 alors que Christiane Taubira avait obtenu 800.000 suffrages. De même qu’une éventuelle candidature de Jean-Pierre Chevènement ne serait pas à l’ordre du jour, Dominique Strauss Kahn n’étant plus le candidat des socialistes.
Les Socialistes croient-ils toujours au Parti, à leur Parti?
Ainsi, les primaires organisées par le PS auront néanmoins permis de mieux connaître les logiques de certains leaders socialistes non évidentes à percevoir par les néophytes de la politique
et interpeler la conscience des militants socialistes cartés et adhérents dont la parole pèse désormais moins que celle des plus de 2.700.000 électeurs à 1 € puisqu’ils sont dorénavant noyés dans la masse des pseudo – sympathisants de gauche à conscience de gauche difficilement mesurable. L’on peut se permettre de poser une question simple. A quoi cela sert d’adhérer à un parti censé avoir une idéologie si pour désigner celui qui portera son flambeau, son drapeau et sa parole pour l’élection la plus importante, on ne peut pas choisir entre camarades adhérents?
La gauche socialiste française aurait-elle définitivement tourné le dos aux militants, au militantisme pour s’inscrire dans la recherche de l’homme sauveur
qui une fois élu a le libre choix de faire campagne sur le programme du parti ou sur les propositions qu’il a développées et sur la base desquelles il croit avoir été élu? N’assistons-nous pas ainsi à l’effacement des partis politiques au profit de l’individu troquant la République contre le Royaume? Ces questions méritent d’être posées car il suffit de se reporter aux réactions de certains «Hollandais» dès l’élection de François Hollande tel que
Julien Dray lançant qu’ «il ne peut avoir deux équipes en concurrence à la direction du parti » avant de plaider pour «un rééquilibrage à l’intérieur de cette direction».
Ces demandes étaient d’ailleurs relayées par la presse parlée et écrite où certains journalistes s’offusquaient ouvertement que ce soit Benoît Hamon qui puisse continuer d’être porte-parole du parti socialiste. Or, dans tout parti politique, le secrétaire général et les instances sont élus au congrès et ne remettent leur mandat en jeu qu’au congrès suivant
. Indiscutablement, le cordon sanitaire entourant François Hollande dont l’essentiel des «Strausskahniens» ont intégré la logique de substitution des primaires au parti et privilégiant ainsi l’ «individu» issu des primaires au collectif sorti des congrès. Or, le PS est dirigé par une triple instance:
Le Conseil National ou «Parlement» du parti dont les membres sont élus à la proportionnelle des motions présentées au Congrès dont le dernier a eu lieu à Reims.
L’Exécutif, lieu du pouvoir que briguent les amis de Hollande assuré par 2 instances:
Le Bureau National (BN) composé de 54 membres plus un collègue de 18 premiers fédéraux désignés à la proportionnelle des motions qui se réunit tous les quinze jours
Et le Secrétariat National où chaque secrétaire national est élu par le conseil national.et a en charge un domaine d’actualité.
Quels sont les rapports de force au sein de l’Exécutif?
Parmi les 75 secrétaires nationaux, postes plus stratégique, Martine Aubry domine largement avec 75,7 % contre 18 % à François Hollande.
Au Bureau National
Le Monde.fr compte 41 soutiens à Martine Aubry et 31 à François Hollande soit un rapport de 57% / 43%.
D’où viennent les soutiens respectifs des deux candidats au sein du BN ?
4 motions étaient en présence au congès de Reims:
La motion «A» conduite par François Hollande et Bertrand Delanoë dont 10 membres ont soutenu Martine Aubry et 10 autres François Hollande;
La motion «C» conduite par Benoît Hamon et Henri Emmanuelli dont les 13 soutiens sont allés à Martine Aubry;
La motion «D» conduite par Martine Aubry est restée fidèle à la 1ère secrétaire avec ses 18 soutiens;
La motion «E»
conduite par Ségolène Royal a apporté ses
20 soutiens à François Hollande au second tour.
Ce rapport de force n’était quand même pas si défavorable à François Hollande mais montre néanmoins à l’évidence que le résultat des primaires n’aurait pas été le même si c’était les militants qui avaient choisi leur candidat à la présidentielle.
Le parti socialiste vient donc de prendre un tournant qui fragilise l’adhérent-militant qui cotise parfois très cher et distribue des tracs au profit d’un électeur d’un jour à 1 euro
dont on n’est même pas certain de sa sympathie pour la gauche. Ce faisant, il conforte le système libéral qui s’accommode très bien de l’individu non seulement parce que mieux contrôlable qu’un groupe surtout de militants parfois non dociles. De plus, le parti socialiste vient de s’inscrire durablement dans la logique de la 5ème République où l’on élit un homme «providentiel» alors que certains en son sein comme Arnaud Montebourg prônent une 6ème République.
A l’évidence son ralliement du second tour à François Hollande montre la mesure de son opportunité. Enfin, au vu de l’analyse des résultats des primaires et des rapports de force à l’intérieur du PS, l’erreur stratégique de Martine Aubry et de ses soutiens au sein du parti
aura été de ne pas laisser la motion «C» de Hamon et d’Emmanuelli se présenter aux primaires laissant le champ libre à gauche à l’opportuniste Arnaud Montebourg. Martine Aubry ne devrait pas commettre une seconde erreur en partageant la direction du parti
sous prétexte de la désignation d’un autre candidat à l’élection présidentielle par des primaires dont les votants sont une douzaine de fois plus nombreux.
Un parti n’est pas forcément d’accord avec toutes les orientations d’un Président de la République en exercice encore moins avec quelqu’un qui ne l’est pas encore.
Le parti doit être la garantie de l’adhérent-militant à contrôler la manière dont ses représentants gèrent les projets qui leur ont été confiés.
Faustin AÏSSI