Bénin: Adrien Houngbédji dans un virage délicat et incertain

FACE A SES ALLIÉS POLITIQUES DE CIRCONSTANCE ET A L’ECHEANCE DE 2011

Adrien Houngbédji dans un virage délicat et incertain

14 janvier 2009 - FRATERNITE

par Brice HOUSSOU

Mars-avril 2011 n’est plus loin. Et Me Adrien Houngbédji et le Prd comptent les jours, dans l’espoir de gagner enfin une lutte commencée depuis 1990 : parvenir à la magistrature suprême. Mais là, l’horizon ne semble pas toujours se dégager. L’appartenance à l’équipage du navire des G et F est-elle la solution ? Car ce navire pourrait prendre de l’eau et couler avant 2011 si les destroyers de Yayi étaient adroits dans les tirs.

Il est évident que même si on faisait une révision constitutionnelle, certains des piliers de notre loi fondamentale ne changeront pas. Il s’agit de la limitation du nombre de mandats (pas plus de deux) et de la limitation d’âge (40 ans au moins et 70 ans au plus) pour la présidence de la République. Voilà pourquoi le Président du Prd (Parti du Renouveau démocratique) Me Adrien Houngbédji aborde la dernière ligne droite de sa carrière politique en 2011. Pour lui, la donne est simple et claire comme de l’eau de roche : ou ça passe, ou ça casse. Ou bien il gagne, ou bien il perd, définitivement, à jamais. Et cela, le Président du Prd n’en est que trop conscient. Voilà pourquoi, il paraît aujourd’hui le premier bénéficiaire de la création et de la solidité de l’alliance des groupes politiques G et F (G4, G13 et Force Clé). Voilà aussi pourquoi il paraît le plus engagé pour assurer la veille politique à cet effet, jouer aux sentinelles de la citadelle qui devra survivre coûte que coûte, la citadelle des G et F qui doit rester solide sur ses fondations, face à l’adversaire qui n’aura de cesse de chercher à l’attaquer et la détruire. Et on peut dire qu’à ce propos, les hostilités sont déjà lancées.

Les partisans de Boni Yayi qui sont bien conscients de ce que la principale menace contre leur candidat en 2011 est bien le Président du Prd, avaient déjà, dès le début du mandat indiqué à ce dernier la porte et le chemin de l’opposition. Tout le monde à la mouvance sauf Houngbédji, ne cessaient-ils de marteler lorsque qu’au début du mandat, le Prd n’affichait pas une position assez claire au niveau de l’échiquier politique. Ceci est maintenant du passé, puisque les erreurs de gestion de Yayi ont donné de la matière aux opposants qui refusaient de s’assumer, du grain à moudre dans un moulin d’opposition qui ne tourne quand même pas assez encore, comparaison faite à un passé mémorable en la matière. Mais passons.

Les partisans de Boni Yayi ne ratent de plus en plus aucune occasion pour tenter de mettre à mal l’alliance des G et F. Du moins, ils ne ratent pas les occasions pour encourager toute fissure qui pourrait naître dans cette coalition et souhaiter que cela conduise à l’explosion. Détruire tout édifice qui est construit sur les fondations faites à Bohicon-Abomey est aujourd’hui le vœu des partisans du pouvoir.

En face, le leader des Tchoco-Tchoco ne manque lui aucune occasion pour rappeler son objectif politique qui se trouve renforcé par ce fameux séminaire de Bohicon des 28 et 29 novembre 2008. On comprend donc pourquoi, en ce début d’année, il en a appelé les forces politiques telles que la Renaissance du Bénin (Rb), le Mouvement africain pour le développement et le progrès (Madep), le Parti social démocrate (Psd) réunis avec le Prd en un bloc appelé le G4, l’Alliance Force Clé et le G13 qui, à Bohicon, ont soutenu avec lui l’idée d’une alternance au pouvoir en 2011, malgré leurs divergences du passé. Son souhait est que ses alliés de l’heure ne baissent pas les bras devant ce qu’il appelle « la sauvegarde de la démocratie béninoise », mais qui pour lui est un pur combat qui a pour objectif de voir le président Boni Yayi quitter le pouvoir en 2011.

Relative fragilité

Avec les dernières prises de positions de la Présidente de la Rb Rosine Soglo qui a appelé au vote sans difficultés du budget de l’Etat 2009, on a semblé voir les prémices d’une cassure de l’alliance. Mais voici que Nicéphore Soglo lui-même embouche la trompette de la rectification en précisant que l’alliance est bien solide, plus que jamais. Soit.

Mais là où il existe quand même une relative fragilité, c’est le fait que la lutte pour l’alternance a été annoncée trop tôt. Déclarer à un Chef d’Etat d’un pays africain qu’on va le chasser du pouvoir et le lui dire assez tôt est bien dangereux. C’est en fait donner les moyens et surtout le temps à ce dernier de se préparer à ne pas partir, à ne pas se laisser « détrôner ». Beaucoup d’analystes politiques pensent en effet que si Tévoédjrè et compagnie, opposants de l’époque Soglo, avaient annoncé assez tôt à ce dernier qu’ils nourrissaient le dessein de le faire partir, ce dernier aurait pris la menace au sérieux assez tôt et aurait eu le temps de mieux fourbir ses armes pour la bataille de la présidentielle de 1996. Et il aurait peut-être gagné et fait ses dix ans au pouvoir.

En s’associant à cette précoce déclaration de guerre contre Yayi, Houngbédji vient de commettre la même erreur qu’en 1997, sous Kérékou. Ce dernier a passé le premier quinquennat à l’humilier, à le détruire. Et même à le punir, jusqu’en 2006.

Et puis, ce rêve de Houngbédji pour 2011, c’est sans compter avec Léhady Soglo, véritable artificier du G4 qui ne manquera pas l’occasion d’utiliser la présidentielle de 2011 pour son dernier essai avant son grand chelem de 2016. Oui, il faut être aveugle pour penser que Léhady ne travaille pas ardemment pour être le « successeur naturel » ( ?) de Yayi. Mais là, on y reviendra prochainement. Ses affiches posées à Abomey-Bohicon lors des séminaires sont la preuve qu’il compte même se positionner comme le candidat de l’alliance pour 2011. Voilà au moins un point sur lequel l’alliance manque de solidité : le combat interne sera lancé pratiquement à un an de la présidentielle, entre Léhady et Houngbédji. Ce sera inévitable !

Brice HOUSSOU