Mamadou Tandja
Le tripatouillage expliqué aux journalistes
Qui va donc pouvoir empêcher le président nigérien, Mamadou Tandja, d’organiser le référendum qu’il a programmé pour le 4 août prochain ? Bien malin qui saura répondre à cette interrogation.
Depuis qu’il a décidé, contre vents et marées, de modifier la Constitution en vue de prolonger son mandat afin, dit-il, d’achever ses « chantiers », Tandja a réussi à balayer les obstacles à son projet. Il réclame seulement 3 ans de plus pour terminer ce qu’il n’a pu faire en 10 ans ! Mais pourquoi, diable, cette race de gouvernants pensent-ils qu’après eux personne ne peut poursuivre les œuvres qu’ils ont entreprises ? L’homme qui avait fait le serment coranique de ne pas toucher à la Loi fondamentale nigérienne s’est dénié aujourd’hui. Ainsi, comme un bulldozer, le chef de l’Etat du pays d’Amani Diori avance irrésistiblement dans le désert du Ténéré. Ce qui pouvait lui résister à l’intérieur est littéralement anéanti.
S’étant octroyé des pouvoirs exceptionnels, notre président devenu Hercule a dissous la Cour constitutionnelle qui s’était courageusement opposée à son projet de référendum. L’opposition et la rue aboient, mais la caravane Tandja passe, passe et passe. L’indétrônable Tandja, inflexible, tente de museler la presse en prenant des sanctions sans préavis contre ce quatrième pouvoir, auquel il a recours. N’a-t-il pas convié, en début de semaine, des journalistes à une conférence pour dispenser un cours sur le référendum ?
Les obstacles extérieurs à ce projet sont comme châteaux de cartes, qui s’écroulent à la moindre sortie du maître de Niamey.
L’Union européenne, qui a tapé du poing sur la table en bloquant une aide budgétaire à l’Etat nigérien, n’aura pas pu faire reculer le président Tandja. Eh oui ! Pas même cette délégation conjointe de l’Organisation des Nations unies (ONU), de l’Union africaine (UA) et de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) n’a pu obtenir de celui qui veut tout simplement rester au pouvoir qu’il abandonne son idée. « Le peuple est venu vers moi pour me demander de rester trois ans de plus pour parachever ce que j’ai entrepris », clame Mamadou Tandja à qui veut l’entendre. Il nargue ainsi cette mission tripartite, qui voulait faire pression sur lui et qui ne l’aura, au bout du compte, même pas impressionné ; l’homme étant resté de marbre.
En effet, après le départ de la délégation, il a martelé, dans un discours fait à la télévision, qu’il ne travaille pas pour la communauté internationale mais plutôt pour le peuple nigérien, qui l’aurait supplié de rester. Il en est venu même à dire qu’il ne craint pas la pression étrangère. C’est toujours la même chose donc : on critique, on manifeste bruyamment dans la rue sans jamais parvenir à faire changer quoi que ce soit ; jusqu’à ce qu’un « fou » use de la force pour régler définitivement les choses.
L’armée nigérienne, on le sait, a dit rester républicaine, mais tout peut arriver, même si, à dix jours du fameux référendum, décrié, on est tenté de croire que le tour est parfaitement joué ; car, au regard des barrières franchies par le président Tandja, tout porte à croire qu’au soir de cette manœuvre, le blanc-seing lui sera donné. En tout cas, MT a tout bravé, tout surmonté, tout laminé pour ne pas arriver à ses fins. C’est dommage parce que c’est la démocratie qui aura perdu dans ce pays.
Agnan Kayorgo
Source: L'Observateur Paalga - 24/07/09