LETTRE DE TCHAOUROU |
24-07-2009
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Monsieur le Président de la République, Une chose que l’on m’avait dite quand j’étais sur les bancs du lycée et que ma mémoire, avec le temps qui passe, avait rangé dans son pli des objets perdus, une chose que vos dernières ‘‘décisions’’ (les guillemets sont importants !) viennent de faire ressurgir dans le pli de ma mémoire où viennent se loger les objets retrouvés, c’est la fidélité de l’histoire au sens de son objectivité, de sa persistance, de son entêtement, entêtement qui fait qu’elle nous rattrape toujours, pour le meilleur quand nous avons été bons, pour le pire quand nous avons été mauvais. La vôtre, permettez-moi de vous le dire, est en train de vous rattraper pour le pire parce que, dès le début, dès votre discours de prestation de serment le 6 avril 2006, vous avez été mauvais, je veux dire que vous vous étiez montré à nous sous un jour peu recommandable, et que seule l’euphorie dans laquelle nous baignions littéralement nous avait empêchés de regarder en face la dure vérité qui s’offrait à nous. Or voici que l’histoire se répète et vous remet face à nous tel qu’en vous-même.
Qu’il vous souvienne, Monsieur le Président ! Ce jour-là, ayant fini votre discours, vous retourniez vous asseoir lorsqu’on vous souffla quelque chose à l’oreille. Nous vous avons vu alors revenir sur vos pas, reprendre le micro et présenter vos excuses aux parlementaires non mentionnés dans votre liste des remerciements. Jusque là tout alla très bien : un tel oubli pour un jour d’une telle euphorie, quoi de plus normal ! Là où le bât blessa, c’est lorsque vous avez cru devoir annoncer urbi et orbi que l’oubli relevait de la seule responsabilité de votre protocole. Nous avons ri, un peu jaune, car nous pensions, sans trop nous l’avouer, qu’il n’était pas de bon ton de vous défausser ainsi sur vos collaborateurs, du moins pas en public, qu’en public il était de bon ton d’assumer l’entièreté de votre discours, ses ombres et ses lumières, ses lacunes et ses oublis. Mais ce jour de grande euphorie devait être immaculée, et nul ne s’avoua la faute plutôt grave que vous veniez de commettre. Mais l’histoire se répète et nous remet en face ce que nous ne voulions ni regarder ni voir, savoir que nous venions d’élire pour nous diriger un homme qui n’assume pas ses responsabilités, qui n’a pas la poitrine ferme, qui n’a pas les reins solides, dont le cœur bat la chamade à chaque secousse, et qui pourrait s’effondrer avant la fin de la course. Monsieur le Président, parce que l’Etat connaîtrait subitement d’énormes difficultés de trésorerie (à vous la faute !) vous paniquez et cherchez partout des boucs émissaires. Cela ne sied pas à votre fonction, et le peuple, comme moi-même, vous observe, médusé. Le gamin pris en flagrant délit de larcin et qui se défausse crânement sur l’un quelconque de ses frères ou sœurs. Quoi donc, ce dévoué ministre de l’Economie et des Finances ! Non seulement il a osé signer, sans vous consulter, un arrêté ministériel avec impact sur la vie de la nation, mais encore il a claqué six milliards de nos francs Cfa sans rien vous dire sur le moment, sans en avoir jamais discuté avec vous, sans vous avoir jamais informé de la nécessité du gré à gré pour aller vite afin que le sommet de la CEN-SAD, votre sommet, se passât bien. Tout cela vous tombe maintenant dessus grâce au travail de l’IGE. Le ministre décidait de tout, tout seul. Il nous gouvernait dans votre dos, et s’il n’y avait pas l’IGE, personne n’en saurait rien, ni vous ni nous. Une couleuvre que vous nous donnez à avaler ? Et puis quoi donc, ce très dévoué ministre de l’habitat, pasteur à ses heures perdues et qui vous accompagnait partout dans vos pérégrinations vers les endroits où l’on adore le Dieu des évangélistes ! Le voilà lui aussi bouc émissaire. Parce qu’il projette de se construire, juste après le sommet réussi de la CEN-SAD, un petit palais pour presque un milliard de nos francs Cfa ? Mais c’est de notoriété publique et vos services de renseignement ont dû travailler. Ainsi que je vous le disais, les extrémistes de Dantokpa veulent votre auto-limogeage. Je ne suis pas d’accord. Mais je commence à craindre pour vous un effet boomerang. Monsieur le Président de la République, je prie Dieu de vous garder en bonne santé pour nous. Gilberte Awa Kassa Source: nouvelle EXPRESSION |