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BENIN - Interview de Benoît Illassa avec des médias béninois : « JE NE SUIS PAS ACHETE, NI ACHETABLE »

3 avr, 2012 | Par Rochereau
 
 
En vacance sur la terre qui l’a vu naître, Benoît Illassa, un Béninois bon teint vivant en France a répondu à certaines préoccupations des médias béninois. C’est dans cette interview que nous vous invitons à lire.
 
 
Benoît Illassa, permettez à nos lecteurs de mieux vous connaître.
 
 
Bien avant la conférence nationale, j’étais l’un des proches Conseillers du président Émile Derlin Zinsou. Nous faisions parties des gens que Kérékou aimait appeler les visiteurs de la nuit. Parce que moi, j’ai travaillé pendant longtemps dans l’ombre. Après donc le président Zinsou, qui est frappé par la limite constitutionnelle de l’âge, nous avons continué par observer la situation politique de notre pays. En 2001, j’ai soutenu le président Kérékou dont j’étais le représentant personnel au bureau de vote à Paris et le vice-président du Bureau Europe du comité de soutien. En 1997, nous avions créé le Haut conseil des béninois de l’extérieur et puis deux ans après, en 1999, le Conseil des Béninois de France dont je suis toujours le Délégué à l’Organisation.

Mon parcourt professionnel, j’ai fait mes études en France, à l’Université de Panthéon-Assas. J’exerce en France dans la même entreprise depuis près de vingt ans, mais je m’intéresse aussi à ce qui ce passe dans mon pays d’origine, le Bénin. Quand le président Kérékou, en 2005, nous a annoncé sa volonté de ne pas rester au pouvoir, il nous a fait comprendre que son dauphin était le président Adrien Houngbédji. Il nous l’a dit parce que j’étais dans le cercle très rapproché. J’ai travaillé à l’époque avec des amis comme les ministres Sylvain Akindès, Pierre Osho, etc. Tout ce monde là s’entendait très bien. Lors de son dernier séjour officiel en France, le président Kérékou nous avait fait la confidence que son dauphin était le président Adrien Hougbédji. Nous avions alors analysé les possibilités qui s’offraient au peuple Béninois et après mûre réflexion, il nous a paru essentiel que l’homme qui, de part son expérience, de part son parcours professionnel, méritait d’assurer les charges de chef de l’État était le président Adrien Houngbédji. Nous avions alors décidé (et quand je dis nous, ce n’est pas une affaire de Benoît Illassa, c’est une affaire d’un groupe très sérieux) de le soutenir. Je me vois encore après le premier tour entrain de constater, ça devait être à midi, après à quatorze heures, le groupe Wloguèdè qui a finalement décidé de soutenir le président Boni Yayi. À ce jour, je pense que cette décision pour moi n’est toujours pas comprise. Parce que, quel que soit le parti politique, c’est dans les partis politiques qu’on forme les militants. Et le rôle du politique, contrairement à un syndicat par exemple, c’est de gouverner. Les hommes politiques ont donc décidé de soutenir un nouveau venu sur la scène politique en la personne du Docteur Boni Yayi.
Alors qu’il n’y avait aucun élément objectif comparatif mais on a décidé de le soutenir. Les hommes politiques sont les responsables des partis. En clair, ils ont décidé de le soutenir et ont, par conséquent, prouvé au monde que pour accéder au pouvoir, il n’est point besoin d’avoir un parti politique. Puisque, si vous vous observez bien la situation, depuis le renouveau démocratique, tous les présidents que nous avons connus n’ont jamais été chef de parti politique. Je rappelle tout simplement que la Renaissance du Bénin est née après l’élection du président Soglo, Kérékou est arrivé, son parti, l’UBF est né après. Boni Yayi a créé son parti quand il a été élu. Donc, le constat est que, au Bénin, un parti politique sert-il encore à quelque chose ? Et cela appelle immédiatement une autre question : c’est que les partis politiques et leurs chefs peinent à positionner des dauphins. Le seul parti qui ait réussi aujourd’hui à vraiment fixer le dauphinat, c’est la RB. C’est le seul parti. Le PRD n’a pas choisi un candidat à la succession de Me Adrien Houngbédji, le PSD, même si le président Bruno Amoussou a concédé ce parti à Emmanuel Golou, il y a des luttes internes qui font que le schéma n’est pas encore bien huilé. Si maintenant, je reviens à la dernière élection présidentielle de 2011, avec les problèmes de la LEPI, je constate, objectivement et sans parti pris que c’est la première fois qu’un président béninois est élu au premier tour avec la formule que d’aucuns ont qualifié de K.O. frauduleux (sourire…).

Moi, depuis 2007, j’ai été vraiment connu à travers mon blog avec un militantisme actif. J’ai fait le choix du parti pris au risque et péril de mes convictions politiques. Parce que pour moi, un homme digne ne devrait jamais marchander sa conscience. Car, tôt ou tard, la seule chose qui reste pour la postérité, c’est cette dignité là. J’ai pris donc les risques calculés et acceptés. Mon engagement a été diversement apprécié du fait que Boni Yayi est un parent. Nous sommes dans un pays où le repli identitaire joue beaucoup et où les élites manipulent les populations avec des résultats décevants. Je veux vraiment rencontrer les acteurs politiques de notre pays sans exclusif. C’est dans ces conditions qu’après un an, après le K.O., je suis venu donc au Bénin et j’ai parcouru l’ensemble du Bénin pour rencontrer les acteurs politiques de tout premier plan.

De manière indirecte, nous avons travaillé, en tant que source, moi je relaie beaucoup vos écrits, donc il était normal, par courtoisie, de vous faire le point de mon séjour au bercail.

Est-ce que vous militez depuis 2007 avec une équipe financée par les gens pour lesquels vous avez une certaine estime ?

Je ne suis membre d’aucun parti politique au Bénin. J’ai toujours fonctionné par affinités, donc j’ai toujours choisi les hommes avec qui travailler. Et c’est en cela que j’ai soutenu les présidents que j’ai cités. J’ai soutenu en 2006 Adrien Hougbédji comme en 2011. Je ne suis pas membre du PRD, mais je suis un sympathisant du président du PRD parce que ce sont ses actes et ses convictions, c’est le personnage que je soutiens et non l’appareil.
 
Vous avez dit que pour cet engagement, vous avez eu à prendre beaucoup de risques, est-ce que vous pouvez en énumérer quelques-unes ?
 
 
Benoît Illassa qui est devant vous est quand même le seul béninois assigné par le président Boni Yayi depuis sa prise de pouvoir. Je suis quand même le seul béninois et de surcroît assigné à l’extérieur qui plus est. J’ai aussi une double nationalité franco-béninoise, je viens de renouveler le passeport béninois, j’ai ma carte consulaire, je tiens beaucoup à ma nationalité béninoise, j’ai été le seul béninois à avoir été assigné qui plus est devant le tribunal de grandes instances de Paris.
 
 
Mais qu’est-ce qui vous oppose fondamentalement à Yayi pour que vous soyez aussi acerbe contre celui qui de plus est votre parent ?
 
 
J’appartiens à l’ère culturelle Chabè, donc, du Zou Nord, plus précisément de Kilibo. Les Chabè avaient créé un groupe de discussions et la plupart des gens qui y intervenaient faisaient l’éloge du président Yayi entre autres. Moi, je comprends, l’administration béninoise étant politisée, les gens venaient pour se faire repérer pour qu’on leur donne une promotion. Moi, j’ai décidé donc d’être l’enfant rebelle et j’ai commencé par attaquer. Mais je justifiais mes prises de position. Certaines personnes ont alors exigé ma tête et l’ont obtenu. Il y a des utopies qui vous renforcent. Puisque c’est mon éviction du forum des Chabè qui a déclenché la création de mon blog ! Donc, je me suis dit, à partir du moment où les gens ne veulent pas un autre son de cloche, que les salamalecs sont saillants, j’ai une liste de diffusion, j’ai presque la totalité des adresses mail des journalistes béninois, et j’envoie mes écris à d’autres, j’envoie mes articles in extenso. Voilà comment j’ai créé mon blog.
 
 
Pourquoi avoir décidé de soutenir Houngbédji contre Yayi ?
 
Houngbédji était candidat en 2006, je l’ai soutenu, étant constant dans ma démarche intellectuelle, je l’ai soutenu en 2011. Maintenant, je prends acte qu’il est forclos par une disposition constitutionnelle de notre loi fondamentale. C’est une nouvelle donne sur laquelle je pourrai éventuellement me prononcer.

Cela veut-il dire que vous seriez candidat aux prochaines élections qui s’annoncent ?
 
 
Non, tel ne sera pas mon ambition. J’ai rencontré mes frères Chabè et je leur ai dit que je n’ai pas d’ambition politique locale. Je ne veux pas être maire, ni député. Mon combat politique n’est pas de venir chasser quelqu’un pour prendre sa place. Donc, je me prononcerai en 2016, je me prononcerai sur les élections législatives prochaines. En 2013, je me prononcerai pour ce qui concerne les grandes villes du Bénin. Tout ce qui a un caractère national m’intéresse. Et je pense que les populations doivent savoir.
 
 
Vous avez combattu le changement, un an après la K.O. Quelle appréciation faites-vous de la refondation ?
 
 
Yayi II, c’est trop tôt à mon avis. Il vient à peine de terminer un an. Arrivé au Bénin, les gens disaient que j’allais être arrêté. Arrivé à l’aéroport, personne ne m’a arrêté, le troisième jour, j’ai été reçu à la présidence de la République par un proche conseiller du chef de l’État, et nous avons discuté loyalement. J’ai essayé de comprendre la politique du chef de l’État et j’ai abordé ce que je savais et ce que j’ai vu de mes propres yeux. Si on devrait faire le bilan de Yayi en quelque sorte, si le président mourait aujourd’hui, et qu’on cherche une place symbolique qui est son œuvre pour lui donner son nom, pour moi, la seule place qu’on pourrait trouver , c’est le carrefour de Godomey. Puisque je ne vois pas d’autres œuvres. L’erreur politique a été de construire les villas CEN-SAD sans construire dans Cotonou des logements sociaux. Tandis qu’aujourd’hui, si vous prenez les gagnes petit, quelqu’un qui gagne 30.000 francs par exemple, comment voulez-vous qu’il vive à Cotonou ? J’ai pris un exemple que j’ai suivi pendant 10 ans, d’une famille qui habitait à Fifadji, plus je revenais au Bénin, plus je vois la famille s’éloigner de Cotonou. Trois ans après, la famille était au carrefour de Godomey, trois ans plus tard, la famille s’est retrouvée à Cocotomey. Donc, la pression des loyers fait fuir les gens. Je me suis interrogé sur le fait et je me suis dit que les cadres vont commencer par balayer eux-mêmes leurs bureaux. Parce que vous ne pouvez pas payer 30.000 francs à un monsieur, et lui demander de se déplacer tous les jours, pour se rendre sur son lieu de travail, de payer le loyer, de nourrir ses enfants, etc. Donc, pour moi, il faut absolument une mixité sociale dans la ville de Cotonou.

Je constate que beaucoup d’entre nous ne connaissent pas le programme politique de Yayi Boni. Moi, ce que je retiens aujourd’hui, c’est deux choses : réduction de la pauvreté et lutte contre l’analphabétisme. Donc, c’est sous le prisme de ces deux points qu’il faut évaluer la politique de Yayi. Les infrastructures et autres, ce sont des choses qui suivront inévitablement. Mais, ce que je propose, c’est que le président prenne deux projets par an. Il lui reste quatre ans, puisqu’on sait que la gestion dans le temps occasionne des actions imprévisibles. S’il prenait deux projets par an, ça fait huit pour le reste de son mandat, donc, il serait à même de les honorer.
J’ai été reçu une seconde fois à la présidence de la République, il y a quelques jours (à chaque fois, le président de la République est informé) on m’a expliqué les affaires que certains pensaient que je méconnaissais et qui étaient sources de mes prises de position. Aujourd’hui, la question qui se pose et qui est fondamentale est de deux sortes que Yayi ne veut pas réviser la constitution pour rester. Il l’a dit clairement lors de son investiture le 6 avril 2011. Il l’a dit aussi au Pape, il l’a dit à Barak Obama. Donc, les discussions qui se passent actuellement, nous absorbent sur la révision constitutionnelle n’ont pas lieu d’être, puisque lui-même s’est prononcé pas pour dire : vous pouvez modifier la constitution mais ne touchez pas aux deux articles essentiels, limitation de nombre de mandat et limitation de l’âge. Je pense qu’à partir du moment où il y a incompréhension, il y a besoin d’être réitéré, à chaque fois que cela semble nécessaire. La deuxième chose est que Yayi Boni a tendu la main à l’opposition après que le président Barak Obama lui ai demandé d’aller discuter avec son opposition. Aujourd’hui, je constate que l’Union fait la Nation n’existe plus comme à son fondement. La R.B. a décidé de saisir la main tendue alors que les autres partis de l’U.N. ont répondu par presse interposée. Aujourd’hui, on m’a dit que cette main tendue était sincère. Mais l’explication que je vais vous donner est que : moi j’ai rencontré le maire adjoint de Cotonou, Léhady Soglo, deux fois depuis mon arrivée. Il y a un ministre de la R.B. qui est dans le gouvernement ! Mais aujourd’hui, de tous les membres du gouvernement, il est le seul membre de la R.B. et on ne lui a pas encore permis de former son cabinet. Par conséquent, il travaille avec l’équipe qu’il a trouvée sur place. Je vous laisse imaginer l’ambiance de cette collaboration. Parce qu’aujourd’hui, c’est le seul représentant de la R.B., on ne peut pas dire que la R.B. est dans le gouvernement. Mais non ! Ça s’illustre. C’est-à-dire que le ministre travaille avec l’équipe qu’il a trouvée. Il n’a même pas pu amener son propre chauffeur. C’est vous dire que s’il est là tout le monde dit que la R.B. est dans le gouvernement, mais ça pose un problème même pour la R.B. parce que c’est une équation qui n’est pas réglée. La main tendue c’est ça !
Moi, je suis dans la situation de quelqu’un à qui son frère lui demande de l’aider à réussir.
 
Si on vous demandait de faire le bilan de la première année du deuxième quinquennat de la refondation, qu’est-ce que vous pouvez dire ?
 
 
Je ne sais pas ce que vous désignez par refondation. C’est un concept. Vous vous me parliez des inégalités ou autres qui participent du quotidien des Béninois, oui. Je n’ai pas la définition exacte de la refondation. J’observe cependant que le président Yayi Boni est le premier président béninois élu président de l’Union africaine. J’observe aussi qu’il a nommé un premier ministre. Ma réflexion, quand j’ai appris que le président Yayi Boni a été élu président en exercice de l’Union africaine, est celle-ci : je me suis dit qu’il va être occupé par les problèmes internationaux. Et qu’il faudrait expérimenter la délégation de pouvoir à son premier ministre qui, contrairement à la Constitution française, n’est pas le chef du gouvernement. La constitution béninoise ne prévoit pas cette qualité au premier ministre. Mais on aurait pu voir comment cela allait être expérimenté. Parce qu’il y a les textes, et l’esprit des textes. Donc, on pouvait expérimenter quitte à le formaliser après dans la constitution. Je constate que ce n’est pas le cas. Donc, le premier ministre est sur une chaise éjectable, en ce moment où nous sommes aujourd’hui comme cela a été le cas avec le président Houngbédji en 1998.
 
 
S’agissant du bilan, tous les grands débats sont d’actualité. Rien n’a été tranché. Le Code de procédure pénale, le Code des médias, etc. n’ont pas encore été votés et on sanctionne la presse sur une base inexistante. Donc ça pose des problèmes et quand je vois ce qui est fait en un an, je constate tout simplement que la société civile s’est réveillée. Est-ce à cause des sujets importants d’ordre national ? Je constate qu’il y a eu ici et là quelques actions sociales mais je pense qu’il faut laisser le président prendre son envol, puisque c’est toujours trop difficile de faire un bilan après seulement un an.
 
Dites-nous concrètement ce qui vous opposait au chef de l’état ?

Il se fait que moi je vis dans un pays qui a plusieurs siècles de démocratie derrière lui et qu’on n’y raisonne pas sur la base ethnique, on ne distribue pas de l’argent pour la campagne électorale etc. ce sont les débats d’idées qui font foi. Donc, quand je charge le président Yayi Boni, je pense que c’est pour l’aider à réussir sa mission. Cela a été toujours mon souci et je pense qu’on lui rend service en le critiquant.
 
 
J’ai critiqué le président Yayi Boni sur des choses que lui-même a corrigées. Par exemple, sur l’histoire des conseillers, il en avait jusqu’à 61. Aujourd’hui, il a renvoyé plus des deux tiers. C’est maintenant raisonnable. Il tient compte des critiques. Si je prends un autre volet, la transparence. Les gens ont raconté dans ce pays que des ministres gagnaient telle somme, les conseillers telle somme. Je me suis réjoui il y a quelques jours quand les salaires des ministres et ceux des conseillers ont été publiés. Ça permet à tout béninois de se situer. Parce que dans tous les pays démocratiques c’est quelque chose qui se fait. Donc, s’il corrige des choses, c’est parce qu’il tient compte des critiques. Ce n’est pas une querelle de personne avec Yayi Boni. C’est une querelle tout simplement politique pour l’aider à bien faire. C’est le sens de mes critiques. Il fallait le critiquer parce que tout le monde à un moment donné était derrière Yayi Boni. Et si on ne le critiquait pas, on ne lui rend pas service. Maintenant, j’avoue que j’ai été peut-être sévère avec lui. Dorénavant, je vais avoir une critique objective et s’il fait quelque chose de bien, je le dirai, s’il fait quelque chose de mauvais, je le dirai aussi. C’est-à-dire que maintenant, comme je l’ai dit, les échéances électorales majeures sont loin. Il faut lui laisser le temps, de toute façon, personne ne veut d’un coup d’État au Bénin, comme ce qu’on vit actuellement au Mali. De toute façon, nous sommes tous des démocrates. Il est élu, il faut lui laisser le temps. Moi comme d’autres, si on peut lui apporter notre expertise pour la bonne gouvernance, il n’y aura aucun problème.
 
Moi, je n’ai pas à prendre d’engagements formels. Ce que je voulais dire, c’est qu’il y a des choses qui peuvent être publiques, d’autres qui ne le seront certainement pas. Parce que c’est dans le sens de tout ce qui participe à l’évolution de ce pays, si je peux apporter une toute petite contribution, je le ferai. Mais comme je l’ai dit, ce n’est pas une affaire personnelle. Quand on attaque le président de la république, on attaque une institution. Ce n’est pas une personne, s’il n’est pas là demain, il y aura une autre personne. C’est l’institution qu’incarne le président de la république qui est attaquée. Maintenant, les thuriféraires vont lui raconter que c’est sa personne, c’est autre chose.
Si vous baissez la garde, qu’est-ce que les gens vont penser de cette attitude. Est-ce que vous n’avez pas peur des critiques ?
Non ! Je n’ai pas peur des attaques, puisque moi-même, je pratique la chose (rires). La meilleure défense, c’est l’attaque. Donc, je suis habitué de la chose. Entendons-nous très bien. Je dis : que je vais continuer de critiquer l’institution qu’est le président de la république pour un mieux-être pour le pays. Je ne suis pas acheté, ni achetable. C’est clair. Que ça soit bien compris ; puisque j’ai rencontré plusieurs sensibilités politiques. Je vous ai dit tout à l’heure que j’ai rencontré le premier adjoint au maire de Cotonou. J’ai rencontré d’autres maires, j’ai rencontré d’autres députés, j’ai rencontré des acteurs politiques de ce pays pour connaitre leur sentiment. Parce que quand vous n’êtes pas sur place il y a forcément des choses qui vous échappent à cause de l’habitude. Si vous prenez la même route tous les matins et tous les soirs, vous n’allez peut-être pas constater des changements. Mais il suffit qu’un étranger vienne vous rendre visite pour le constater, parce que c’est une question d’habitude. Moi, je ne suis pas devenu F.C.B.E., comme je n’étais pas hier P.R.D., comme je n’étais pas hier R.B. Je n’étais militant d’aucun parti politique. Je soutiens des hommes à travers les idées qu’ils incarnent. Je mets, mon analyse à contribution, parce que je publie souvent ce que vous publiez. Donc, ma conduite sera déterminée hier comme aujourd’hui par la pratique du pouvoir. Si le pouvoir commet des erreurs, je les dénoncerai. S’il y a des dossiers cachés, Benoît Illassa que vous connaissez va les porter sur la place publique. Moi j’ai la chance contrairement à vous que la HAAC ne peut pas me censurer. Ils en sont incapables.
Vous êtes à Cotonou dans quel cadre ?
Je suis en vacances. Je viens souvent au pays, parfois plusieurs fois par an, mais depuis 2008, j’ai pris un peu de recul parc qu’il faillait que je continue ce que je fais. Mon blog a été créé en 2007. Les vacances sont faites aussi pour ça. Je rencontre donc les acteurs socio-politiques de notre pays pour échanger, pour mieux lever les incompréhensions. Maintenant, l’avenir nous dira ce qui se passera ici. Le Bénin n’est pas isolé non plus. Vous voyez l’environnement. Et la presse, vous devriez parler beaucoup de ce qui se passe autour de nous. Parce qu’on a l’impression quand on lit la presse béninoise que le Bénin est replié sur lui-même. Vous voyez des événements au mali, des événements au Sénégal, etc. Ce sont des choses qui auront de l’influence sur la pratique politique dans notre pays.
Un mot sur l’opposition.
Aujourd’hui, l’opposition est composée d’un seul parti de gouvernement. A savoir, le PRD. Le PSD n’est plus un parti de gouvernement. Si je prends les dernières élections législatives, le MADEP n’est plus un parti de gouvernement. Un parti de gouvernement c’est un parti qui a la capacité de se constituer en groupe parlementaire et un certain nombre de députés qui sont représentatifs à l’Assemblée nationale. Lorsque vous avez trois députés, vous ne pouvez pas gouverner. Parce qu’il faut faire des alliances stratégiques. Donc, aujourd’hui, le seul parti de gouvernement qui pèse c’est le PRD. Maintenant, comme je l’ai dit, le PSD n’a pas préparé un dauphin pour succéder à Bruno Amoussou. Il faut voir ce qui s’est passé au Sénégal. Maky Sall a 50 ans et il a travaillé avec Wade. Aujourd’hui, qu’on le veuille ou pas il va recréer ou le PDS ou un autre parti autour de lui. Niasse et Tanor Deng sont des has been aujourd’hui. Et on se demande si l’opposition existe encore dans notre pays. Nous n’avons pas de leaders identifiés. À part le président Amoussou, quels sont les cadres identifiables autour de lui qui vont prendre la relève. En 2016 ce sera qui ? Nago ne pourra faire qu’un seul mandat, ABT également, de même que Koupaki. Donc, tous ces trois candidats là se retrouvent dans la position d’Adrien Houngbédji en 2011. Ils vont se retrouver avec le parti ou les partis qui auront l’intelligence de préparer la jeunesse. Parce que tous ceux dont ont parle : Bruno Amoussou, Adrien Houngbédji, ils avaient 50 ans à la conférence nationale. Mais aujourd’hui, ils sont forclos. Quelle est alors la nouvelle génération ? Le peuple béninois a soif de l’opposition mais l’opposition est absente. En plus, on n’a pas encore fait le bilan de 2011. Je parle surtout de l’opposition pour tirer les leçons de l’échec. Pour moi, c’est peut-être des querelles de personnes et non d’appareil qui continuent de plomber l’opposition béninoise.
En clair, Benoît Illassa opte pour un candidat plus jeune ?
Il faut que la nouvelle génération prenne le pouvoir ou arrache le pouvoir. Parce que le pouvoir ne se donne point. Il s’arrache. En ce qui me concerne, les trois noms cités plus haut sont hors jeu. Parce que quand vous élisez quelqu’un qui n’a qu’un seul mandat à faire, le risque est qu’il veuille modifier la constitution pour rester ou qu’il veuille bâcler son mandat. On retombe dans l’incertitude. Ce que je ne souhaite pas. Je pense qu’il y a des cadres valables dans ce pays qui peuvent valablement exercer cette fonction. Le capitaine qui a fait le coup d’état au Mali, il a quel âge ? (40 ans). Donc, ce n’est pas à 70 ans qu’on va reconnaître les mérites d’un Homme, quel qu’il soit!

Vous voyez, ce qui s’est passé au Sénégal, en Côte d’ivoire où au lieu de dire simplement le droit, les sages de la Cour constitutionnelle on torpillé les textes. Nous avons beaucoup de vieux briscards qui peuplent notre administration qui ne sont pas en phase avec les réalités actuelles. Alors, quand est-ce qu’on va promouvoir ceux qui travaillent pour que le pays se développe? Il faut qu’il y ait une vertu physique comme le président l’a dit, mais moi je veux lui rappeler qu’il faut commencer par l’appliquer à ces vieux-là. Parce que quand on a été boursiers de l’État, fonctionnaire de l’État, retraité de l’État, il faut que certains arrêtent de vivre toute leur vie aux dépens de l’État. C’est vrai que certains ne connaissent même plus le prix du carburant, quel est le prix du pain ? Ils sont coupés des réalités du peuple. Donc, vous ne pouvez pas gérer les autres dont vous ignorez tout des réalités quotidiennes. Ce n’est pas possible.

Merci Benoit Illassa.
Les médias béninois
Source: L'Autre Fraternité
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