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Les Bantu chez les Tupi, La Route de l’Esclave en Amazonie, par Souindoula Simao 
29/11/2007

La présence bantu attestée. C´est l´une des grandes conclusions de la Première Réunion Internationale de la Diaspora Africaine en Amazonie, rencontre scientifique qui vient de se tenir dans la sympathique ville de Porto Velho (29-31 octobre), capitale de l´Etat brésilien de Rondônia. Une trentaine de spécialistes venue d´Afrique, des Amériques, des Caraïbes et d´Europe, parmi lesquels Simao Souindoula, Directeur du Musée National de l´Esclavage et Vatomene Kukanda, Directeur de l´Institut des Langues Nationales d´Angola, viennent de confirmer ce fait.
En effet, des noyaux insurrectionnels, les fameux quilombos, regroupant, majoritairement, de résistants congo, ngola et benguela se sont incrustés et perpétués, courageusement, dans le redoutable amas forestier équatorial de l´Amérique méridionale.  
Organisée par la Fondation Universitaire Fédérale de Rondônia (UNIR), avec le concours de plusieurs organismes homologues, nationaux et espagnols, mais également, et de divers programmes associés au Projet de l´UNESCO, « La Route de l´Esclave » tels que le Chaire des Etudes Afro-Ibéro- Américaines de l´Université de Alcala de Henares, en Espagne, et la Société Culturelle Tadia, la conférence du « Vieux Port », aménagé sur le fleuve Madeira, l´un des affluents du puissant Amazone, a été l´occasion de présenter et d´apprécier divers aspects du peuplement noir de la portion brésilienne de l´immense « Foret Primaire ».
Les intervenants ont, ainsi, examiné des questions telles que les modalités de l´enracinement, dans la région, surtout á partir du XVIII siècle, des marrons mélano-africains, la configuration des espaces de liberté, ainsi crées, les continuités lexicales d´origine africaine enregistrées dans ces communautés, le profil anthropologique de ces sociétés de survie, leur adaptation ou réinsertion dans l´écosystème amazonien et les vagues successives d´arrivée de la main d´œuvre néo-esclave, mouvements notés entre le XIX et le XX éme siècle, impliquant des travailleurs venus de l´Amérique du nord, des Caraïbes et des autres zones de l´interminable ensemble fédéral, ouvriers qui furent assignés á la construction ferroviaire, á l´exploitation du lucratif hévéa, á l´aménagement des routes transamazoniennes et á la mise en valeur agro-pastorale contemporaine de la cuvette.
Se fondant sur ces bases historiques, naturellement handicapantes, les participants á la concertation de Rondônia, une des 27 composantes territoriales brésiliennes présentant une population majoritairement non blanche, ont, ensuite, évalué les conditions d´accès des populations afro-amazoniennes de l´ensemble fédératif aux soins de santé, aux différents cycles de l´enseignement et leur implication dans les programmes de conservation des écosystèmes du bassin vital. Ils ont conclu leur diagnostic par la revue du paquet des très revendicatives actions dites affirmatives menées, en cours d´exécution et envisagées par la « Communidade ».  
Intervenant au cours de la conférence plénière qui lui avait réservé, Simao Souindoula a souligné, d´entrée de jeu, l´inévitabilité du peuplement insurrectionnel, forcé ou économique africain de la dense foret du bassin de l´Amazonie.  
En effet, pour le Directeur du Musée National de l´Esclavage de Luanda, en Angola, ce fait historique avait une déclinaison, prévisible et stratégiquement intelligente, celle de l´arrivée dans la cuvette, á très grands arbres et presque toujours verte, de groupes de rebelles bantu.
 
Configuration gémellaire
 
Cette caractéristique tenait, selon Souindoula, á la configuration gémellaire de l´implantation esclavagiste portugaise, concomitamment, sur les cotes de l´actuel territoire de l´Angola et celles du Brésil. S´étant octroyé, dans une dynamique d´auto-correction territoriale, un immense territoire á coloniser en Amérique du sud, le Portugal y installera, durant prés de quatre siècles, prés de trois millions de Bantu embarqués á partir, notamment, de la Loango Coast, de la baie de Cabinda, de l´embouchure du Zaïre, de Sao Paulo de Assumpçao Loanda, de Benguela a Velha et de Sao Felipe de Benguela.
Ce sont ces captifs qui s´échapperont des dangereux puits d´extraction minière et des incontrôlables plantations de sucre pour se réfugier dans la zone pré-amazonienne du Mato Grosso, ou, héroïquement, dans la sécurisante masse forestière inter- équatoriale. 
Le Directeur du Museu do Morro da Cruz a confirmé l´arrivée dans l´exoréique bassin, moyen et inférieur, de l´Amazone de quilombeiros « bantu », singulièrement des rebelles malimbés, cabindas, luangos e mayombés, qui retrouvèrent le même milieu bio-physique et y perpétuèrent, naturellement, leurs croyances d´origine, celles du Bas-Congo, de caractère clairement naturistes, animatistes et panthéistes.      
Concluant son exposé, le conférencier a insisté sur la nécessité de mener des études comparatives sur les particularités linguistiques et anthropologiques des civilisations des Bassins du Congo et de l´Amazonie, travaux qui éclaireront, divers points, non seulement, de la science fondamentale mais aussi de ses déclinaisons appliquées, comme celle relative á la salvatrice phytothérapie. 
 
Teresa De Benguela
 
L´on notera que la thèse de l´existence de groupements bantu dans le nord-ouest brésilien, territoires libres de l´esclavage, défendue par l´américaniste angolais, a été corroborée par les travaux de l’historien, Vice Recteur de l´UNIR, Marco Antonio Domingues Teixeira et de ses assistantes Hildeniza Furtado et Joane de Lima Santiago, dans la communication sur les vestiges bantu dans le parler des communautés quilombolas de Guaporé. Ce point de vue a aussi été certifié par l’équipe placée sous la coordination du vétéran linguiste d´origine belge, Jean Pierre Angenot et par Odete Burgeile.
 
En effet, les premières collectes effectuées au niveau de la langue parlé, limitées, pour l´instant, á la Vallée du Guaporé, á la limite de la frontière bolivienne, attestent, déjá, de dizaines de bantouismes, assez classiques dans le contexte brésilien, tels que les génériques congo ou ngola ou les substantifs épenthétisés tels que abantó, groupe de personnes, amazi, eau, fleuve, canguru ou anguru , porc et macuca, vieille, etc.   
A ce sujet, l´une des grandes révélations de caractère historique de la réunion de la « Reitoria » a été la perpétuation le long du fleuve septentrional de Rondônia, de la mémoire d´une résistante noire, Tereza de Benguela, qui avait préféré le sacrifice suprême á l´humiliation esclavagiste.
 
Interrogé sur l´importance de la rencontre de Porto Velho, Simao Souindoula a souligné le pont logique que les participants avaient érigé entre le lourd passé de ces afro-descendants et les difficultés d´ordre économique, juridique et éducatif qu´ils affrontent, péniblement, dans l´impitoyable univers social brésilien.
Afrikara
Tag(s) : #Contribution de la Diaspora
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