Les pays asiatiques, ont, dans la plupart des ateliers de réflexion sur le développement, été cités en exemple lors du symposium sur le cinquantenaire des indépendances africaines. A la fin des années cinquante les pays asiatiques avaient le même niveau de développement que les pays africains. Mais aujourd’hui, à l’heure des bilans d’étape, la quasi-totalité des pays africains comptent parmi les plus pauvres de la planète. Sans ressources minières denses, comme le connaissent les pays africains, ils sont arrivés à se hisser dans le peloton de tête dans les indicateurs de développement élaborés par les organisations internationales.
Quelques exemples montrent bien le niveau de performance atteint par certains pays. C’est le cas du Vietnam, producteur de café insignifiant il y a dix ans, qui est devenu le deuxième exportateur mondial de café. Surclassant l’Indonésie en 1999 le Vietnam s’est hissé au rang de premier producteur de robusta, et se classe aujourd’hui en troisième position de producteur mondial de café derrière le Brésil et la Colombie. Certaines statistiques le donnent même aujourd’hui numéro deux mondial derrière le Brésil.
Il n’y a quasiment aucune usine de transformation locale du café produit et seulement environ 4% de la production est consommé localement. C’est donc sur un marché international qui définit le cours des matières premières que le Vietnam a réussi ses performances. Cet exemple met à mal les arguments de certains Africains qui se plaignent de leur non maîtrise des cours de certains produits. C’est pourquoi, encore ici à Cotonou, ils réaffirment avec force leur souhait d’être impliqués dans les instances de décision et de définition des cours de certains produits minéraux.
Tout est à faire
Engager une compétition sur un marché tel qu’il est, n’est pas encore totalement admis par les Africains qui évoquent la survivance de certaines injustices qui favorisent « l’exploitation sans complexe de leur sous-sol ». Ainsi, de nombreuses recommandations ont-elles encore un ton incantatoire, celui dont on fait les beaux discours. Pour certains participants au Symposium sur le cinquantenaire des indépendances africaines « il faut tourner le dos à certaines phrases toutes faites sans être fatalistes » pour envisager autrement les questions de développement.
L’exemple des pays asiatiques est éloquent, surtout quand ils ne définissent pas leur développement par rapport au mécanisme de réparation et d’aides. « L’assistance au développement a son rôle à jouer mais celui-ci ne peut aller au-delà d’un certain point. Par exemple, nous pouvons construire des écoles avec l’aide, mais sans vision qu’apprenons-nous à nos enfants ? Nous pouvons fournir de l’électricité dans nos villes et villages mais comment espérer un avenir brillant si ce progrès est basé sur le bon vouloir et la générosité d’autrui », a déclaré le président Paul Kagame, qui appelle à une nouvelle définition des objectifs par les Africains eux-mêmes.
Des différentes commissions qui ont rendu leurs conclusions, on remarque une constance de recommandations « de choses à faire ». En fait tout est à faire. C’est donc un vrai constat d’échec qui a été fait à Cotonou après cinquante années d’indépendance des pays africains. Les chantiers sont gigantesques, tout le monde semble trouver la force dans la construction de nouveaux ensembles : les Etats-Unis d’Afrique. Les jeunes le veulent maintenant, les politiques le souhaitent, mais force est de constater que les institutions mises en place pour un tel objectif battent toujours de l’aile. Toutefois, certains esprits éclairés ont saisi la balle au bond lorsque les questions de sécurité, de paix et de démocratie ont été abordées pour faire remarquer que l’exercice du pouvoir par de nombreux gouvernants et régimes était un vrai frein au développement. Ce sont peut-être donc les Etats-Unis d’Afrique qui étoufferont ces propensions à la récurrente mauvaise gouvernance, dont individuellement aucun gouvernement ou régime ne se sent coupable. Tout le monde en parle, et face à ceux à qui le reproche pourrait être fait, les regards deviennent fuyants.