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LA CROIX DU BENIN
Hebdomadaire Catholique: Justice - Vérité - Miséricorde
 
26 octobre 2008
 

5e GOUVERNEMENT DE YAYI: Une équipe pléthorique


De 26 membres dans l’ancien gouvernement, le président Yayi passe à 30 ministres pour la nouvelle équipe qu’il a formée le mercredi dernier  sans la garantie d’avoir réglé les problèmes de cohésion, d’unité et de performance qui se posent à l’exécutif depuis un certain temps.



Le remaniement ministériel, longtemps attendu, est finalement annoncé dans la nuit du mercredi 22 octobre. Tout le monde parle de troisième gouvernement. Or, techniquement, c’est bien le 5è décret de constitution de gouvernement du changement, sans compter les décrets de modification.
Le temps passé à attendre le remaniement ministériel a fait son effet sur certains ministères. On a pu observer que, ces dernières semaines, certains ministres sortants se rendaient beaucoup plus visibles à la télévision, sachant certainement ce que l’effet de visibilité, à défaut de productivité, peut leur apporter. Tout récemment, un ministre a médiatisé les difficultés de son département à défaut de les résoudre. Une manière, s’il échouait, de se faire reconduire, de préparer sa transition de retour à sa société civile. Une manière qu’il vaut mieux se garder de qualifier. Dans cette ambiance où les tensions provoquées par les députés en rejetant le collectif budgétaire, n’avait pas encore baissé, la nouvelle du remaniement est arrivée.

 

La logique du gouvernement


Après avoir rendu public le décret portant composition du gouvernement, le secrétaire général du gouvernement sortant, fraîchement nommé Garde des Sceaux, a donné deux raisons qui sous-tendent la formation de la nouvelle équipe pléthorique de 30 ministres : équilibre régional et les priorités. C’est l’essentiel de l’explication qu’il a donnée. L’opinion publique a besoin de plus d’explication.
En regardant de près certains nouveaux ministères comme ceux de la recherche minière et pétrolifère ; de l’économie maritime et de la réforme portuaire ; et de la gouvernance locale, on comprend aisément les priorités du gouvernement. Ces priorités correspondent indubitablement à des préoccupations réelles. Mais pourquoi ces priorités méritent qu’on crée des ministères et non des directions ? Ainsi, le président Yayi vient de battre son propre record. De 26 ministres dans le gouvernement précédent, il passe à 30 dans le nouveau. Certains Béninois se rappellent sans doute encore que, au début de l’exploitation de la SCO et du champ pétrolier de Sèmè-Kpodji, dans les années 80, le président Mathieu Kérékou a formé un cabinet d’une vingtaine de ministres. La presse internationale a commenté: « avec un litre de pétrole et un paquet de ciment, le Bénin se dote de 22 postes ministériels.. ». Depuis, le nombre de ministères ne cesse de croître. 30 ministres pour le Bénin ? C’est très préoccupant. En dehors d’une logique de partage du pouvoir, une telle équipe pléthorique ne se comprend pas. A l’analyse, les ministres issus de milieux religieux sont tous maintenus au gouvernement, tout en changeant parfois de portefeuille. La plupart des autres ministres sont issus de petites forces politiques, régionales et sociales. Cela rappelle la technique de conquête de la présidence par le candidat Boni Yayi. Les 30 ministres sont-ils déjà une machine de guerre de réélection reliée à une multitude d’organisations religieuses, politiques et sociales ? Si le président est en droit d’organiser sa réélection, les citoyens sont aussi dans leur droit de veiller à ce que les bienfaits recherchés par le changement souhaité ne finissent pas de passer aux oubliettes. Sur ce gouvernement nombreux, l’opinion publique peut exiger des explications pour plusieurs raisons L’opinion doit donc demander plus d’explication.

 

 

Pourquoi une équipe pléthorique ?


Premièrement, même si en Afrique, certains pays ont un grand nombre de ministres dans leurs gouvernements, dans le monde en général, ce sont les grands pays comme le Brésil qui ont jusqu’à 30 ministères. La tendance dans le monde est plutôt à la réduction de la taille des gouvernements.


Deuxièmement, les équipes successives du président Boni Yayi montrent des signes de faiblesses en gestion du temps et en cohésion gouvernementale. Aller jusqu’à 30 ministres, n’est-ce pas en rajouter aux problèmes ?


Troisièmement, certains ministres partants ont eu à peine le temps de se voir aménager des bureaux décents. Ne parlons même pas de la constitution de leurs cabinets. Ils sont venus au gouvernement et en ressortent avant d’avoir les conditions de performance. La question maintenant n’est pas seulement de savoir pourquoi aller jusqu’à 30 ministères. Il faut aussi s’inquiéter pour le nombre de ministères qui sont nouvellement créés ou reconstitués. Le temps de gérer les questions pratiques d’installations coûteuses et de faire face aux conflits d’attribution et de compétence, les nouveaux ministres  et ministères n’en finiront pas de rechercher les conditions matérielles et organisationnelles de performance qu’il leur faut.

 

 

Malaise persistant


Finalement, si le remaniement ministériel était supposé résoudre les difficultés politiques, il n’y est pas encore arrivé. Car, chose rare, deux ministres nommés issus des députés du G 13 devenu 12, déclinent l’offre.  Le dégel n’est donc pas pour bientôt à l’Assemblée parlementaire.
Il est à craindre que la tension politique à l’extérieur de l’équipe gouvernementale se fraie un chemin à l’intérieur d’un gouvernement qui hériterait et amplifierait les querelles intestines et les coups bas. Avec des passations de services organisées en quelques heures, les ministres partants n’auront pas le scrupule d’une sérieuse reddition de comptes qui aurait fortement intéressé l’opinion publique. Et c’est déjà au niveau des dossiers plus ou moins bien transmis entre un ministre et un autre, entre une équipe ministérielle et une autre que beaucoup de jeux se font. Il faut ajouter à tout cela la difficulté  de voir la pertinence entre le profil professionnel de certains ministres et leurs portefeuilles. Il est important de vite face à ce malaise.

Alain Sessou


Tag(s) : #Politique Béninoise
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