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2ÈME BRAQUAGE AU MARCHE DANTOKPA
Cotonou à feu et à sang

 

24 novembre 2008 - FRATERNITE

 

par Adrien TCHOMAKOU

Les usagers du marché Dantokpa ont été une fois encore victimes d’une attaque sauvage le vendredi 21 novembre 2008 après celle du 1er avril dernier. Les gangsters ont une fois encore cambriolé l’agence de Diamond Bank Dantokpa après avoir arrosé de balles celle de EcoBank en faisant six morts et plus d’une vingtaine de blessés graves.

 

Le film des échanges de tirs entre gangsters et forces de l’ordre

 

Les crépitements de balles ont failli ébranler toute la République. 21 novembre 2008, vendredi noir pour les commerçants du marché international Dantokpa. Aux environs de 19 heures 30 minutes, les usagers de la route qui mène au pont Martin Luther King, ex nouveau pont de Cotonou et les populations riveraines, ont été plongés dans une psychose générale causée par des crépitements de balles.. Des lance-roquettes, des armes lourdes et autres armes de guerre de dernière génération ont permis aux assaillants de réussir une fois encore leur attaque sauvage. Ils ont cambriolé l’agence de Diamond Bank du plus grand marché du Bénin faisant six morts dont un militaire et plus d’une vingtaine de blessés graves. De sources policières, les malfrats ont d’abord arrosé de balles l’agence de EcoBank de Dantokpa avant de saccager celle de Diamond Bank. C’était le sauve-qui-peut. Une situation de débandade générale qui illustre bien l’ampleur de l’attaque à main armée orchestrée par les gangsters venus et repartis par voie maritime. En effet, pour accomplir leur sale besogne, les visiteurs de circonstance n’ont pas lésiné sur les moyens. Par vagues successives, les assaillants ont regagné leur champ d’opération par moyens de barque motorisée et de véhicule banalisé de marque Land-Rover. Dans un scénario digne d’un film western, les gangsters ont tiré dans tous les sens à l’arme lourde forçant au passage les grilles d’entrée de l’agence Diamond Bank de Dantokpa. Une situation qui ressemble fort bien au braquage du 1er avril 2008 dans ce marché. Le mode opératoire étant le même. Les coups de feu nourris tirés dans tous les périmètres de Dantokpa par les hors la loi en disent long. Malgré les échanges de tirs entre l’armée béninoise et ces crapules, des liasses de billets soigneusement rangées dans les caisses de l’agence Diamond Bank ont été emportées. « On était en soutien au commissariat spécial de Dantokpa quand vers 19heures 30 minutes, on a entendu des coup de feu. Je me suis dépêché, je me suis déguisé avec cette tenue où j’ai pris un élément pour me soutenir. On a rampé jusqu’au niveau de la berge lagunaire. C’est de là que nous avons commencé par riposter. » a déclaré Mohamed Samadou, Sergent-chef du 1er bataillon motorisé. Alertés, les éléments de la sécurité publique n’ont pas tardé. Les unités spécialisées de la Brigade anti-criminalité (Bac), des Recherches actions interventions et dissuasion (Raid) et de la Compagnie républicaine de sécurité, appuyées par l’armée de terre, ont pris d’assaut la zone commerciale du marché Dantokpa et ont enclenché une course-poursuite contre ces hors la loi. Les échanges de tirs nourris qui ont suivi le déploiement des troupes loyalistes ont duré plusieurs heures. Les forces de l’ordre ont quadrillé la zone commerciale avant d’asseoir une ceinture de sécurité autour de l’ex nouveau pont interdit de toute circulation au plus fort de la bataille rangée entre gangsters et les éléments de la sécurité publique. Après avoir encerclé les alentours du marché Dantokpa et procédé à un ratissage systématique de la zone, les forces de l’ordre ont retrouvé sur les lieux, un véhicule d’immatriculation Ipk de marque Land-Rover abandonné par les malfrats dans leur fuite vers le quartier Hindé. La hiérarchie militaire et policière s’est immobilisée pour s’enquérir du degré de mobilisation de la troupe. Aux côtés du ministre en charge de la sécurité publique, on retrouve le chef d’Etat major général des armées, le général de division Mathieu Boni, les directeurs généraux de la police et de la gendarmerie nationale et le commissaire central de la ville de Cotonou. Tous ont tenu à appeler les uns et les autres au calme et à la sérénité.

 

A quand l’implantation d’un mirador sur la berge lagunaire ?

 

Si la sécurité n’a pas de prix, pourquoi le gouvernement n’a toujours pas installé un mirador sur la berge lagunaire depuis le 1er avril 2008, date à laquelle le premier braquage est survenu à Dantokpa où plusieurs militaires ont été froidement abattus, armes à la main. Qu’est-ce qui n’a pas fonctionné dans le dispositif sécuritaire mis en place par le général de première division Mathieu Boni, chef d’Etat major général des armées ? Le gouvernement ne nous avait-il pas servi le 03 avril dernier qu’une centaine de militaires ont été déployés à Dantokpa pour mieux sécuriser cette zone commerciale ? Où étaient alors passés ces militaires ? Les armes dont les forces de l’ordre font usage sont-elles aussi performantes que celles utilisées par les gangsters ? Et, pourquoi le gouvernement ne tient guère à ses promesses en matière de sécurisation des biens et des personnes ? Car, on se souvient encore qu’aux lendemains du braquage du 1er avril dernier, l’ex ministre de l’intérieur et de la sécurité publique, le général Félix Hessou avait servi à l’opinion publique que la zone commerciale Dantokpa sera mise sur vidéosurveillance. Où en sommes-nous avec ce projet ? L’affrontement du vendredi 21 novembre dernier vient de confirmer que l’armée béninoise est malade. Il y a trop de ratés et de dysfonctionnements en son sein. Même si notre pays dispose des armements plus lourds que ceux dont les assaillants font usage, il est clair que l’organisation des troupes est à revoir. Des explications du général Mathieu Boni, il ressort que les attaquants sont venus en nombre important.

 

« La police était informée de l’arrivée des gangsters »

 

Eugène Boya, Dgpn - 14.8 ko
Eugène Boya, Dgpn
 

Le commissaire central de la ville de Cotonou, Constant Sossou a été clair et cohérent dans ses propos face aux hommes des médias. Il a déclaré en substance que la police nationale était saisie depuis plus d’une semaine de la descente au Bénin d’un groupe d’assaillants, et ceci par voie maritime pour cambrioler les agences EcoBank et Diamond Bank de Dantokpa. Selon ses propos, des émissaires de ces gangsters étaient même à Cotonou la semaine dernière et cinq d’entre eux ont été arrêtés. « Nous étions informés et nous avons même déjà arrêtés cinq personnes le mardi dernier. Des individus qui rôdaient autour de la berge lagunaire et qui portent des chaussures militaires », a déclaré le commissaire central Constant Sossou. A l’en croire, un dispositif sécuritaire a alors été mis en place pour prévenir toute attaque. Malheureusement, les crapules ont eu raison des forces de l’ordre.

 

Les explications du général de division Mathieu Boni

 

 
Le Chef d’Etat Major, Général de 1ère division, Mathieu Boni - 11.3 ko
Le Chef d’Etat Major, Général de 1ère division, Mathieu Boni

Vers 20 heures, nous avons été saisis de ce qu’il y avait des coups de feu au marché Dantokpa. Et policiers, militaires et gendarmes, on s’est mobilisé pour voir ce qui se passe. On a pris nos dispositifs, mais les gangsters étaient en nombre important, ils étaient plus nombreux que la dernière fois. Ils ont des matériels beaucoup plus importants, des explosifs, des armes lourdes. Et comme vous le constatez, pendant plus de trois heures d’horloge, on a échangé des coups de feu et ils ont réussi à défoncer l’agence Diamond Bank avec beaucoup de moyens. Pendant les échanges de tirs, ils se sont retirés. Pour le point des pertes en vies humaines, nous avons déjà enregistré quatre dont un soldat et trois civils. En ce qui concerne les pertes matérielles, ce ne serait qu’après l’audition des banquiers par la police qu’on pourra établir ce qui s’est passé. Mais je dois conclure qu’une telle opération ne peut réussir de leur part s’il n’y avait de la complicité de la part de la population béninoise. Et ça, on le soupçonnait déjà, il y a des complices au sein des populations et c’est ça qui favorise une telle opération. Sinon un étranger ne peut pas venir et réussir une opération du genre. C’est impossible, au plan militaire du point de vue des opérations. Les recherches continuent du côté des forces de sécurité. Espérons qu’on puisse mettre la main sur quelques-uns pour pouvoir remonter à la filière. Je n’ai pas une idée des effectifs. Mais au regard des dégâts causés dans les banques, vous pouvez constater que ce n’est pas un petit nombre qui est arrivé. Cette situation me rappelle celles de Lagos et du Cameroun tout récemment qui montrent que les gens sont décidés et arrivent en nombre très important avec des matériels de guerre, avec un encadrement militaire à la hauteur de leurs actes. Le dispositif a été renforcé par la police et l’armée aux lendemains du braquage du 1er avril. Les éléments sont là et patrouillent de jour comme de nuit. Les gens avant d’opérer ont dû étudier les effectifs qui sécurisaient la banque.

 

Délocaliser les banques de Dantokpa

 

Le ministre de la décentralisation, Seïdou Alassane et le Dg/Sogema appellent les usagers de Dantokpa au calme - 22.8 ko
Le ministre de la décentralisation, Seïdou Alassane et le Dg/Sogema appellent les usagers de Dantokpa au calme

L’argent attire les malfrats qui n’hésitent guère à faire des pertes en vies humaines pour s’en approprier. Et pour ne plus enregistrer des morts d’hommes suite à un quelconque hold-up des agences de EcoBank et Diamond Bank du marché Dantokpa, les usagers de ce marché exigent la délocalisation pure et simple de ces deux banques qui viennent encore de plonger plusieurs familles en deuil. Un message porté à la connaissance du ministre de la décentralisation et des collectivités locales, Alassane Séidou et du directeur général de la Société de gestion des marchés autonomes (Sogema), Joseph Tamègnon au lendemain de cette attaque meurtrière. Pour le ministre, « ce sont des propositions qui méritent d’être analysées. Si les banques sont là, c’est certainement, parce que leur présence se justifie. Sinon, elles auraient elles-mêmes choisi de quitter. Si elles sont là, c’est parce qu’elles arrivent à exercer normalement leurs activités. Donc, la pertinence de leur existence ne doit pas être discutable. Maintenant, s’il est question de renforcer la sécurité, on verra ». A en croire Alassane Séidou, le gouvernement du changement mettra davantage des moyens à la disposition des forces de l’ordre pour que la sécurité soit de mise dans la zone commerciale. Il a ensuite déploré les dégâts enregistrés et présente, au nom du gouvernement béninois, ses condoléances aux familles éplorées. « J’estime que c’est quelque chose d’assez grave puisqu’il y a eu des morts et les usagers du marché Dantokpa ont subi des préjudices matériels graves. C’est assez grave, ce n’est pas la première fois que ça arrive. Toutefois, le gouvernement fait des efforts supplémentaires pour empêcher que cela revienne. Mais malheureusement, autant le gouvernement se bat pour l’empêcher, autant les braqueurs font des efforts pour contourner le gouvernement. Je crois qu’il faut que les usagers aient confiance au gouvernement. Le gouvernement va s’inspirer de tout ce qui se passe pour qu’à l’avenir, puisse mieux faire », a-t-il laissé entendre. Pour le directeur général de la Sogema, la délocalisation des banques n’est pas à l’ordre du jour. A cet effet, il déclare : « je ne pense pas qu’il faille précipiter les décisions, je pense que ça nécessite qu’on prenne le temps de réfléchir, d’étudier, d’enquêter et de trouver les solutions idoines ».

 

Boni Yayi suspend les activités des banques de Dantokpa

 

Le Chef de l’Etat s’imprègne de l’attaque sauvage à Dantokpa - 26.2 ko
Le Chef de l’Etat s’imprègne de l’attaque sauvage à Dantokpa
 

Quarante huit heures après les échanges de tirs soldés par un bilan lourd, le Chef de l’Etat, le Dr Boni Yayi a effectué une descente au marché Dantokpa pour constater les dégâts causés par les assaillants. Tout en appelant les usagers de ce marché au calme, le premier magistrat de notre pays prend une décision salutaire. Il suspend toutes activités des institutions financières du marché Dantokpa. Il ordonne, en effet, la fermeture de EcoBank et Diamond Bank du plus grand marché du Bénin. Le président Boni Yayi a mis en place une commission qui se chargera de lui faire des propositions concrètes sur la sécurisation des institutions bancaires de notre pays. Une commission qui doit rendre son rapport dans deux semaines au plus tard. L’occasion était pour le chef de l’Etat de s’imprégner du mode opératoire des assaillants. Dans un langage militaire, le général de première division Mathieu Boni a porté à sa connaissance que les gangsters ont utilisé des matériels dissuasifs et l’armée béninoise n’a pas fait usage de ses armes lourdes au risque de faire plusieurs morts dans le rang des usagers du marché Dantokpa.

 

Ils ont dit

 

Dg Cnhu

Au niveau du Centre national hospitalier et universitaire (Cnhu) Hubert Koutoucou Maga de Cotonou, nous avons provisoirement reçu quinze blessés graves. Nous avons déploré un décès par la suite et au nombre des blessés, il y a des blessés graves au niveau de l’abdomen qui ont été très rapidement pris en charge par deux équipes de chirurgiens renforcées par des équipes venues du camp et de l’hôpital des instructions des armées. Il y a eu des blessés au niveau des os, notamment au niveau du thorax. Certains ont reçu des balles et tous ceux-là sont en train d’être pris en charge avec diligence.

 

Professeur Chobli

 

Il y a des balles dans les poumons, dans le ventre, dans le cou, dans la colonne vertébrale. Nous avons catégorisé les blessés et deux d’entre eux sont en bloc, avec deux équipes chirurgicales. Le 1er avait plusieurs balles dans le ventre qui sont déjà extraites. Malheureusement, les balles ont fait beaucoup de dégâts qui sont en train d’être réparés. Les autres malades seront opérés au fur et à mesure de la libération du bloc, compte tenu de la gravité de leur lésion. Ceux qui peuvent attendre jusqu’à demain sont mis quelque part. Du point de vue personnel, on a eu toute l’équipe qu’on pouvait avoir dans une telle situation. En dehors du patient décédé chez nous, il y a trois autres malades arrivés, décédés de l’extérieur qui ont été conduits à la morgue. A l’hôpital St Luc, ils ont eu deux malades dont un enfant décédé juste avant d’arriver à l’hôpital.

 

Ministre Issifou Takpara

 

A notre connaissance, il y a une vingtaine de malades dont cinq décès que nous déplorons. L’équipe dirigeante fait le maximum. Renforcée par les équipes venues du camp et de l’hôpital des instructions des armées, l’équipe du Cnhu lance un appel pour le sang. C’est urgent.

 

Ministre Armand Zinzindohoué

 

« Nous sommes venus ici pour encourager le personnel médical qui prend en charge nos concitoyens qui ont reçu des coups dans cette attaque sauvage de ces hors la loi. Au nom du Chef de l’Etat et de son gouvernement, je voudrais présenter toutes mes condoléances aux familles éplorées et leur dire que nous les soutenons. Pour ce qui est des malades blessés, ils ont le soutien des autorités et leur prise en charge au niveau du Cnhu ne souffrira d’aucune défaillance. La lutte contre l’insécurité est un combat sans merci et je suis persuadé que la victoire sera de notre côté.

Adrien TCHOMAKOU



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