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Opinion : Projet de service civique patriotique et militaire [5 juillet 2007]
La République inégalitaire : tous les porteurs d’handicaps à la poubelle Le Rapport de la commission Sossa, terme de référence 4 : intitulé l’identification des profils des appelés : je cite « En outre, au niveau des enseignements primaire et secondaire, la condition spécifique est que, l’appelé soit exempt de bégaiement, de surdité, d’infirmité et jouisse d’une acuité visuelle au moins égale à 6 / 10 sans correction… » ...

Plus qu’un rapport, la commission Sossa a élaboré un avant projet. Au-delà de toute polémique, nous pensons en ce qui nous concerne que cette initiative est et sera de toute façon utile à la tranche d’âge visée compte tenu de la situation socio-économique déplorable qui constitue le lot quotidien de ses jeunes. Au-delà donc de son utilité indéniable, elle porte en elle, comme toute initiative humaine, ses forces et faiblesses. Ce n’est donc qu’à l’expérience que nous pourrons tirer des conclusions et dresser au terme de l’apprentissage de la 1ère promotion un bilan. Ceci étant, le point 4 du rapport Sossa, appelle de notre part quelques observations. Notamment en ce qui concerne la condition spécifique au niveau de l’enseignement primaire et secondaire. S’il est vrai que la surdité et le bégaiement peuvent constituer un handicap sérieux à l’exercice de la fonction d’enseignant, nous nous demandons pourquoi cette spécificité s’entend aussi et ce, d’après le rapport à « l’infirmité » et cela sans distinguo. De notre point de vue, il ne faut point globaliser les handicaps (infirmité).Handicaps lourds, d’accord, mais il existe des handicaps légers, hormis le bégaiement et la surdité qui peuvent parfaitement s’accommoder de ce service. En effet, ne s’agit- il pas d’un service civique patriotique et militaire ? Toutes les informations et explications que nous avons pu glaner de part et d’autre, nous ont fait apparaître clairement que le service dont il s’agit ici est totalement différent du recrutement classique et traditionnel sous les drapeaux qui ne tient aucun compte du niveau du diplôme. L’initiative gouvernementale repose sur deux grands piliers.
 Premier pilier : La formation civique et patriotique faisant spécifiquement appel à des qualifications diplômantes et qui couvre neuf mois sur douze du projet. Deuxième pilier : La formation purement physique et militaire qui couvre deux mois en première phase du service et un mois en dernière phase, soit au total trois mois.

La formation civique et patriotique. Celle-là nous en avons tous besoin dans notre pays, jeunes, adultes, hommes, femmes, enfants, citadins ruraux, valides, non valides et qui sais-je encore ? Elle doit partir du berceau et être continue et permanente. J’en conclus donc que les personnes porteuses d’handicaps soient également concernées au même titre que quiconque et ne doivent donc être rejetées pour ce service. Les exclure, serait une grave et dangereuse discrimination qui violerait donc la constitution de notre pays et la charte universelle des droits de l’homme.

La formation militaire : A la lecture du rapport Sossa, celle-ci court sur une période de trois mois, même si dans l’esprit du rapport, les jeunes seront casernés et vivront au quotidien dans les conditions réelles d’un appelé. Nous croyons que ce serait faire une grande injure à la grande muette que de croire que la formation militaire se résume au fait de marcher, de courir, de sauter, de ramper, de porter des armes et des paquetages. Ce serait faire preuve d’une ignorance coupable que de croire que les militaires ne sont attachés qu’à des tâches physiques et athlétiques qui ne réservent aucune place à l’émulation intellectuelle et mentale. L’armée, ce sont les muscles, mais c’est aussi d’abord et surtout le cerveau. Pris sur l’angle de la performance physique et athlétique, force est de reconnaître qu’un porteur d’handicap à un membre supérieur ou inférieur ne peut être abstrait à de telles performances. Mais le porteur d’un tel handicap ne peut-il être un bon professeur de mathématiques, de biologie, de français ou d’anglais… !

Ce ne sont pas tous les handicaps qui altèrent les facultés intellectuelles et mentales. Aux quatre coins de notre planète, chacun de nous côtoie tous les jours des handicapés qui s’avèrent de très bons professeurs, d’excellents médecins, des cadres rompus et compétents. Nous nous posons, en ce qui nous concerne, la question de savoir pourquoi les forme-t-on ? Pourquoi subissent-ils les mêmes épreuves d’examen au même titre que les dits valides. Ne leur délivre-t-on pas les mêmes diplômes, pour au final prétendre ne point se servir d’eux ! N’observons-nous pas dans la vie active chez nous au Bénin des porteurs d’handicaps parfaitement inscrits dans la vie active, dans l’administration publique de même que dans le privé ?

Nous recommandons que les géniteurs de ce rapport, ou tout au moins que lors de son adoption à l’Assemblée nationale, il soit pris en compte le fait que la présente initiative n’exclut de manière guillotineuse et sans aucun discernement les porteurs d’handicap. Je crois avoir compris que ce service est volontaire. Je préconise donc, que tout jeune entrant dans la classe d’âge retenue par le rapport Sossa et portant un handicap qui ne l’invalide au point de ne pouvoir enseigner ou d’assumer une fonction sanitaire ou administrative puisse également se présenter. Il appartiendra au corps médical, à un collège civil et militaire de se prononcer sur chaque cas, de manière spécifique. Ceux qui seront jugés aptes pour le présent service seront tout simplement dispensés de toutes les activités physiques comme c’est d’ailleurs le cas dans bien d’entités publiques, notamment les écoles. Il ne faudrait pas que nous rations tous une occasion en or et une grosse opportunité de justement donner une leçon de morale, de patriotisme, de civisme, de solidarité et de tolérance à toute la jeunesse de notre pays à laquelle l’initiative s’adresse. Ne pratiquons pas l’exclusion. Faisons au contraire la promotion du respect de la différence en intégrant certains handicapés au projet. En n’écartant pas totalement et définitivement nos jeunes sœurs et frères porteurs d’handicaps de ce projet gouvernemental, le Bénin aura une fois encore innové et émerveillé le monde, montrant ainsi que le processus démocratique en cours chez nous ne veut laisser au bord de la route ou sur le carreau, aucun de ses fils et filles.

Gabriel Sakponou (Administrateur des assurances, directeur de société)

 
Tag(s) : #Le matinal
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