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Courrier international - n° 851 - 22 févr. 2007
Amériques
ÉTATS-UNIS - Le Ku Klux Klan reprend du poil de la bête
L’organisation, dont les effectifs n’avaient cessé de fondre ces dernières années, attire de nouveaux membres en axant sa propagande sur la condamnation du mariage homosexuel et sur le rejet de l’immigration illégale.
Après des années dans l’obscurité, le Ku Klux Klan (KKK) semble renaître. “En s’appropriant avec succès des sujets sensibles, le Klan connaît un regain d’activité aussi surprenant qu’inquiétant”, indique un rapport national de l’Anti-Defamation League (ADL).
Le mariage gay et la violence urbaine sont devenus ses nouveaux chevaux de bataille. Mais le Klan doit surtout son essor aux débats sur les questions posées par les presque 35 millions d’immigrés présents sur le sol américain, dont environ 11 millions sont sans papiers. Le KKK, qui recrutait principalement dans le sud des Etats-Unis (où il fut fondé, en 1866, par des vétérans sudistes), gagne cependant aujourd’hui du terrain dans l’Indiana, le Michigan, l’Ohio, l’Iowa, le Nebraska, le Maryland, le New Jersey et la Pennsylvanie. Selon les estimations de l’ADL – qui lutte contre les propagateurs de haine, notamment les antisémites –, le Ku Klux Klan n’est pas une organisation centralisée et compterait de 5 000 à 8 000 membres répartis dans 179 sections.
Ce qui inquiète surtout les associations de défense des droits de l’homme est la vitalité de son militantisme (organisation de rassemblements, campagnes de recrutement, distributions de tracts et de pamphlets racistes), ainsi que sa politique de rapprochement avec les mouvements skinheads, néonazis et racistes. Et, comme à ses débuts, le KKK se targue d’avoir une dimension religieuse. Pour ses membres, allumer une croix est un acte de foi. Selon les études de l’institut de sondages Pew Research Centre, l’opinion selon laquelle les “nouveaux arrivants menacent les coutumes et les valeurs traditionnelles de l’Amérique” est aujourd’hui plus largement répandue chez les chrétiens évangéliques que chez les protestants traditionnels et les catholiques romains. Le Klan cherche à exploiter ce sentiment en recrutant des Américains hostiles à la politique d’immigration américaine.
D’une certaine façon, c’est un retour du Ku Klux Klan aux origines. “On a tendance à penser que le KKK n’est qu’une organisation partisane de la suprématie des Blancs, mais à son apogée le Klan était farouchement opposé à l’immigration et se montrait très virulent à l’égard des immigrés catholiques, notamment les Irlandais et les Italiens”, rappelle Brian Levin, directeur du Centre de recherche sur le racisme et l’extrémisme à la California State University, San Bernardino. C’était durant les années 1920, quand le KKK comptait environ 4,5 millions d’adeptes. Pendant le mouvement les droits civiques (1954-1965), ce chiffre est tombé à 60 000 et, au milieu des années 1970, on dénombrait à peine 2 000 membres, explique M. Levin, un avocat des droits civiques qui enseigne également le droit pénal.
“Si cette nouvelle hausse des activités et du nombre des adhérents semble spectaculaire, c’est surtout parce que le Klan repartait de très bas. Je pense qu’il atteindra rapidement un plafond à cause de son symbolisme négatif, souligne-t-il Que le KKK cherche à exploiter le thème de l’immigration, c’est plutôt logique ; ce qui m’inquiète davantage, c’est qu’aujourd’hui tout le monde cherche à exploiter cette peur de l’étranger. Je crois que le Klan est de toute façon condamné à l’échec à cause de sa mauvaise réputation.” “Mais, ajoute-t-il, l’avènement d’Internet a modifié la situation. On peut aujourd’hui piocher des idées racistes ça et là sans pour autant chercher à obtenir une carte de membre.”
Si certains membres du Ku Klux Klan arborent encore de longues tuniques et des cagoules lors de leurs manifestations, les plus jeunes sympathisants ressemblent davantage à des skinheads ou à des néonazis. Ils ont les bras recouverts de tatouages racistes et écoutent des groupes de rock extrémistes comme Screwdriver et Brutal Attack.
De 2000 à 2005, le nombre de groupes propagateurs de haine a augmenté de 33 %, passant à 803, indique le Southern Poverty Law Centre. Et le Ku Klux Klan constitue une part importante de cet accroissement.
Brad Knickerbocker
The Christian Science Monitor
 © Courrier international 2007 | ISSN de la publication électronique : 1768-3076    
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