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De l’ancienne à la vieille classe politique

 

Par Arimi CHOUBADE

15 mai 2008


Les parents de victime de torture ne comprennent toujours pas pourquoi les sépultures des ex-dignitaires de la révolution refleurissent depuis l’arrivée de Yayi Boni au pouvoir alors que celles de leurs proches sont envahies par la broussaille sauvage. Parakou avec le sanctuaire consacré à Abdoulaye Issa et Dassa-Zounmé avec celui de Adjo Bocco Ignace. Tous idéologues des années de plomb sous la bannière du grand camarade de lutte qui s’est d’ailleurs tapé une décennie de prolongation catastrophique à l’ère du renouveau démocratique.

A ces héros socialisant, Yayi Boni doit une stratégie politique d’une placidité à faire froid dans le dos. En leur temps, il s’agissait de « liquider l’ancienne politique à travers les hommes qui la porte ». Les émergents ont fait plus court « liquider la vieille classe politique ». La volonté d’écraser tous les modèles existants demeure le leitmotiv partagé aussi bien sous la révolution que sous le changement. Deux notions, du reste, très voisines de l’avis de nombreux linguistes.

Pour faire une fenêtre sur les inquiétudes de Julien Togbadja et ses compagnons, on pourrait dire que le régime du changement s’est imposé une morale assez louable. Il ne pouvait pas honorer les « bourreaux » à Parakou et à Dassa-Zounmé et songer à réhabiliter les victimes de camps de concentration et de torture que les mêmes bourreaux ont inspiré à travers une idéologie totalitariste.

Et puis, la démarche géostratégie obsessionnelle du docteur-président n’a pas échappé à cet épisode. La verdure électorale des cauris a décidé d’élire domicile dans le septentrion (Parakou) et le département des Collines (Dassa). On ne peut prétendre à l’héritage électoral du grand camarade de lutte sans ménager des susceptibilités. L’omission de l’âme en peine d’un certain Michel Aïkpé à l’occasion de ce processus de réhabilitation à contre saison coule de source donc.

Revenons à la liquidation de la vieille classe politique pour constater, cette remarque de Soglo qui colle si fortement à la posture actuelle du régime du changement : l’erreur sur l’époque et le pays. Abdoulaye Issa et Adjo Bocco Ignace comptaient sur les lieux de détention de Ségbana, de Parakou, du petit Palais à Cotonou. Les révolutionnaires pouvaient se permettre de réduire au silence de manière physique tous les anciens présidents de la République. Maga, Ahomadégbé, Apithy étaient transportés de département en département en secret et sous haute surveillance, loin de tout contact. Les forces de répression traquaient et châtiaient les milieux scolaires et estudiantins.

Le Bénin du renouveau ne saurait prêter flanc à l’instauration de la prédation des libertés. Aucune liquidation politique n’est possible sans le passage par les urnes. L’inculture ambiante chez les émergents ne leur permet certainement pas de tirer leçon de l’infortune de leurs modèles révolutionnaires. Je me garde d’emboucher la trompette de la punition suprême pour offense aux anciens qui auraient emporté les « anti-héros » célébrés par le changement. Néanmoins, la claque électorale des 20 avril et 1er mai 2008 consacre une revanche de cette classe politique que l’on dit vieille et vouée à la casse.

Tous les héros ne sont pas des modèles, dirait l’autre.



Tag(s) : #EDITORIAL
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