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  Nouveau découpage du pays :L’arme de guerre de Yayi Boni pour 2011

 

 

21 octobre 2008 - LE MATINAL


Le chef de l’Etat a lancé le mercredi dernier les activités de la commission nationale chargée de l’élaboration du projet de loi pour le nouveau découpage territorial. Après le coup d’essai du ministre Issa Démolé Moko qui a suscité un tollé général dans le pays, la nouvelle option vise, dit-on, à calmer tous les esprits pour permettre au président Yayi Boni de reconquérir le pouvoir en 2011.

Le nouveau découpage territorial dont les activités ont été lancées le mercredi dernier est l’un des actes les plus importants pour le président Yayi Boni de rempiler sans difficulté en 2011. Outre le fait qu’il ait su se donner très tôt les moyens pour contourner ses adversaires politiques qui l’attendaient sur ce terrain pour lui rendre la vie dure, le projet permet aussi de court-circuiter tous ceux qui, jusque-là, ont pensé mettre les populations à profit pour remettre en cause les nouveaux chefs-lieux de départements. Avec cette stratégie, le président Yayi Boni et les autres chantres du changement pourront donner satisfaction à presque toutes les tendances antagonistes dans ce dossier. Selon certaines sources, on pourrait même dans cette affaire hautement politique, passer de 12 à 18 ou plus de départements encore. Pour émietter autant que possible les circonscriptions électorales mais aussi et surtout dans l’intérêt d’opposer certains hommes politiques dans leurs fiefs. D’aucuns affirment déjà que le pays n’est pas trop loin d’être divisé en 24 départements juste pour mettre tout le monde à l’aise et en profiter pour fragiliser les forces politiques dites de l’opposition. Une stratégie que les autres n’ont pas, pour le moment, les moyens de contourner sans se détruire réciproquement dans leurs propres fiefs. Analysons les situations aux cas par cas. En prenant en compte d’abord la situation sensible des départements de l’Atlantique et des Collines où il y a visiblement plus de problèmes. Dans le département actuel de l’Atlantique, ce sont les habitants des régions comme Ouidah, Allada et Abomey-Calavi qui se chamaillent autour de leur chef-lieu. En optant pour la division de l’Atlantique en deux départements avec Ouidah et Allada comme les capitales, on aura déjà réglé le problèmes à plus de 50% pour ne pas dire plus. Il restera seulement le cas d’Abomey-Calavi qui est en réalité très facile à gérer. Les ressortissants sont pour la plupart des étrangers qui y sont venus élire domicile et les clivages politiques qui les caractérisent ne sont de tendance à permettre une certaine harmonisation des points de vue qui pouvait déboucher sur des éventuelles contestations. Les forces publiques pourront facilement être mises à profit pour contenir ceux qui tenteront de s’agiter. De même, les cas de trahison ainsi que les autres manœuvres politiques qui ont permis de déstabiliser la Renaissance du Bénin lors de l’installation du conseil communal et de l’élection du maire pourraient constituer d’autres atouts pour mieux gérer le cas d’Abomey-Calavi. Ainsi, on aurait réglé définitivement le cas de l’Atlantique qui a constitué jusque-là un os dur à croquer. La stratégie sera identique pour le département des Collines qui a aussi fait couler d’encre et de salives. Là également, c’est la manière dont les membres de la commission Yayi Boni pour le découpage territorial auront réussi à colmater les brèches qui permettra de sauver les meubles. C’est en divisant également ce département en deux et en tenant surtout compte des deux grands groupes ethniques que sont les Mahi et les Nago que l’équipe dirigée par l’ancien ministre Richard Adjaho aurait rendu service au président Yayi Boni dans cette affaire purement électoraliste. Ainsi, une Capitale à Savalou ou à Dassa dans ces conditions et une autre à Savè auraient largement réglé presque tous les problèmes et les éventuels autres grincements de dents trouveraient leur solution dans les manipulations et l’usage stratégique de la puissance publique. Pour le reste du pays, on n’a pas besoin forcément d’avoir deux départements dans le découpage actuel. Il suffit de bien analyser les dessous des frustrations politiques, la capacité contestation de certains hommes politiques des différentes localités et les intérêts économiques, historiques, moraux et stratégiques pour préconiser des bonnes orientations.  

Un piège pour les forces dites de l’opposition

La stratégie qui consiste à laisser une commission se pencher sur un tel dossier et de proposer une loi pour organiser le découpage territorial est un piège pour les forces politiques dites de l’opposition. Elles pourraient être tentées de refuser de voter une telle loi. Elles seront ainsi face à deux difficultés de taille. Au moment à le chef de l’Etat serait amené à recourir aux mesures exceptionnelles pour faire appliquer la décision, ces hommes politiques pourraient facilement avoir leurs électeurs à dos. Car, tout le monde veut que sa région soit désignée comme le chef-lieu de département. Les hommes politiques qui s’y opposeront pourraient se rendre impopulaires et être vomis par les leurs au motif qu’ils sont en déphasage par rapport aux intérêts de la localité. C’est pourquoi, le refus de voter une telle loi pourrait leur être préjudiciable. Surtout qu’ils n’ont pas actuellement de moyens pour communiquer aisément et justifier leurs positions. A contrario, le pouvoir Yayi Boni a de bons moyens pour montrer l’intérêt pour telle ou telle région d’être désignée comme capitale et surtout aura à loisir les marges de manœuvres nécessaire pour faire miroiter aux populations de grands projets liés à ce statut. Dans tous les cas, c’est le déséquilibre entre les moyens qui limite les chances des forces dites de l’opposition dans ce dossier sensible.  

La prudence cependant

  Si plusieurs atouts s’offrent au chef de l’Etat dans la nouvelle option du découpage territorial, il y a le fait que les cadres commis à la tâche ont besoin de s’entourer d’un certain nombre de garanties pour ne pas tomber dans les mêmes difficultés que le ministre Issa Démolé Moko. On ne saura jamais les initiateurs de son comité technique de désignation des récents nouveaux chefs-lieux de départements. Cependant, il aura été le seul à ramasser les pots casses de ce ballon d’essai qui n’a pas prospéré au point où les populations sont descendues dans les rues pour obliger le gouvernement à désavouer son ministre. C’est pratiquement la même situation qui guette les 20 membres de la commission installée le mercredi dernier par le chef de l’Etat pour gérer cette affaire de découpage territorial. Le cas serait dramatique si ceux-là se laissaient aller seulement à l’improvisation, à la précipitation et à des calculs politiques sans tenir compte des réalités du Bénin. Parce que chacun des acteurs doit savoir que c’est dans leur même mouvance que les problèmes commencent assez souvent. Ce sont certains d’entre eux vont commencer par jouer aux plus intelligents pour finir par glisser des peaux de bananes aux autres. A partir de ce moment il sera inutile d’espérer un résultat concluant des activités de cette commission qui va travailler pour un mois. Ce sont les mêmes complications et prises de positions qui ont eu cours lors de la rédaction de la constitution du 11 décembre 1990 où tous les participants n’avaient pas les mêmes objectifs. Il y a avait dans le groupe, certains grands juristes et autres praticiens de droit qui étaient obligés de se soucier de leur avenir politique ou celui de certains de leurs protégés en agissant. Dans la foulée, le document a été fortement miné compte tenu des intérêts de chacun. Il faut craindre qu’on en arrive à cette situation fâcheuse de la loi fondamentale actuelle dont plusieurs dispositions sont sujettes à polémique. Car, certains membres de la commission peuvent penser que leur localité d’origine a besoin d’être un chef-lieu à cause de telle ou de telle autre raison et ils ne peuvent pas travailler dans un tel groupe sans y penser. Dans ces conditions où les bases avaient été mal définies ou inexistantes, un découpage territorial avec des chefs-lieux de départements qui ne répondront pas aux attentes pourrait simplement aider à raviver les tensions au sujet de cette affaire pour obliger un nouveau recommencement ou le retour à l’ancien ordre, c’est-à-dire les six premiers départements, Contre les intérêts du chef de l’Etat qui aurait bien pu profiter de sa nouvelle option pour mieux préparer 2011.

Jean-Christophe Houngbo (Br. Ouémé/Plateau)



Tag(s) : #Politique Béninoise
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