Bénin: Le décret et la malice du roi Boni 1er

Le décret et la malice du roi Boni 1er

 Par Arimi CHOUBADE
21 novembre 2008

Les émergents ne pouvaient se priver d’une touche de ruse en un jour aussi spécial que ce 20 novembre 2008. Le jour de la prise du décret d’application de la loi portant statut de l’opposition malheureusement assorti de la convocation d’une kermesse pour les 27 et 28 novembre. Une conférence nationale bis au nom de la réconciliation nationale. Deux jours de discours, de libations, de congratulations et de jetons de présence. Pour les courtisans, deux jours de gratifications conséquentes sur le même registre que la fête du 1er août à Parakou à 3,3 milliards ou le forum des religieux à 150 millions.

Par contre, on pourrait se demander la satisfaction que Amoussou, Houngbédji, Séhouéto, Léhady, Salé et consorts pourraient tirer d’une promiscuité de 48 heures avec la nébuleuse de société civile. Surtout que le diagnostic que le pouvoir lui-même fait de la situation du pays à travers le conseil des ministres du 20 novembre évoque « une incompréhension entre acteurs et forces politiques ». En clair, ce sont acteurs et forces politiques qui devraient s’exercer à conjurer les raisons qui font que la compréhension mutuelle a déserté le forum. La société civile n’a donc logiquement pas à se mêler d’un débat entre politiciens en rogne les uns contre les autres. Indépendamment de la polémique quasi permanente sur les trous de conjugaison entre certains professionnels attitrés de la société civile et le pouvoir en place. A se poser la question de savoir si Rékiath Madougou pourrait siéger au nom du gouvernement ou de l’Association Elan. Si Gbègnonvi viendrait porter l’étendard de Fcbe pour qui il s’est mouillé le maillot à Ouidah aux municipales ou représenterait Transparency-International.

Deux journées de réflexion. Une convocation cavalière, péremptoire, sans consultation ni sur l’objet ni sur la date ni sur le lieu ni sur les invités. Comme si le mémorandum du G13, la déclaration du 12 mars 2008 au palais des sports de Kouhounou, les déclarations conjointes G4, G13 et Force Clé n’ont jamais existé. Comment empêcher les gens de douter des motivations réelles de cet opportunisme à fleur de peau ? Sans jouer au rabat-joie, ces deux journées de réflexion sentent l’échec à milles lieues à la ronde. Les agitateurs publics se chargeront plus tard de surfer sur une prétendue mauvaise volonté de la vieille classe politique. Je vois d’ici s’étaler sur des panneaux géants de publicité des louanges à la gloire de la prétendue main tendue du docteur-président. Le relais de la propagande se fera un point d’honneur à brocarder tous ces apatrides radicaux qui empêchent le gouvernement du Changement de faire le bonheur des Béninois.

Il n’y a pas que les « G » et « F » à qui les tortillements des idéologues du régime donnent le tournis. Un jour à Abidjan, un autre à Libreville suivi de la prise du décret d’application de la loi portant statut de l’opposition, de la convocation de deux journées de réflexion. Alors qu’on sort d’un remaniement ministériel à rebondissement ; que plusieurs communes restent sans conseils communaux élus ; que des recettes du budget national continuent d’être dépensées en dehors de tout contrôle parlementaire ; que les scandales politico-financiers servent de ferment à la guerre de clans entre ministres du nouveau gouvernement.

La prise du décret sur le statut de l’opposition procède du respect de la légalité républicaine. Le geste se suffit en lui-même sans qu’on ait besoin de rajouter des palabres populistes. Les émergents attendent de ce geste une séance d’applaudissement en l’honneur de leur champion de la part d’un auditoire composé de toute la vieille classe politique à l’occasion d’une grandiose cérémonie de lancement des fameuses journées de réflexion. Et puis il parait que la situation « freine la poursuite du programme d’action du Gouvernement ». Tiens ! Un programme d’action du gouvernement sous Yayi Boni ? Jusqu’ici on n’a parlé que de la vision du docteur-président.

Est-ce une nouvelle forme de ruse ?