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FILIERE NOIX DE CAJOU
Une source alternative de devises pour l’économie béninoise

 

4 mars 2009 - FRATERNITE

par Moussa EL-HADJI MAMA

A un moment où la production du coton continue de s’enrhumer, le Bénin, dans sa politique de diversification des filières agricoles vient de placer l’anacarde comme une alternative sûre. Une filière porteuse et source de devises pour l’économie béninoise qui se veut émergente....

 

Initialement introduit pour le reboisement, l’anacardier (Anacardium occidentale, Anacardiacées), une culture de rente, est devenu la deuxième source d’exportation du Bénin après le coton. En 2000, la noix de cajou représentait plus de 9% des exportations nationales avec 12,5 milliards de Fcfa de noix exportées. Avec 3 % de la production mondiale, le Bénin est le 5ème producteur mondial d’anacarde, après l’Inde, le Brésil, le Mozambique, et la Tanzanie. La région Zou-Collines constitue la principale zone de production avec plus de 50% des surfaces. Viennent ensuite Atacora- Donga, Borgou- Alibori, Ouémé-Plateau, et enfin Mono-Couffo. La région Atlantique-Littoral ne produit pas d’anacarde. Les plantations domaniales représentent aujourd’hui 20% des surfaces en anacarde. On estime à 2.100 ha les surfaces encore exploitables, moyennant des opérations d’entretien et de réhabilitation. Aujourd’hui, la majorité des plantations sont aux mains de paysans qui cultivent individuellement l’anacardier à petite échelle. La dynamique de développement de l’activité est portée par les plantations privées. Ainsi on estimait en 2000 que 40% des vergers étaient âgés de moins de 5 ans. En réalité, le cajou est un produit d’exportation qui procure aux exploitants des vergers d’anacarde un revenu supplémentaire de 45.000 à 120.000 FCFA par hectare. Aujourd’hui, différentes organisations s’observent autour de cette spéculation qui bénéficie de beaucoup d’attention de la part du gouvernement depuis la production jusqu’à la commercialisation. Le week-end dernier à Ketou, le ministre du commerce, Christine Ouinsavi n’a pas manqué le coche pour réaffirmer la volonté du Chef de l’Etat de faire de la filière cajou, une source de devises. " La construction d’une économie émergente passe nécessairement par le changement du statut de pays exportateur de matières premières exclusivement à celui d’exportateur de produits manufacturés ", a-t-elle indiqué.

En effet, le gouvernement s’évertue aujourd’hui plus qu’hier à régler les différentes imperfections du marché (l’absence d’acheteurs officiels, la forte fluctuation des prix, les risques liés à la monoculture, etc.). C’est dans cette optique qu’une enquête quantitative avait été menée auprès des différents acteurs à savoir 198 producteurs, 61 commerçants et 7 transformateurs. Et les résultats issus de l’étude ont montré que les systèmes de production sont rentables alors que la transformation et la commercialisation des noix ne favorisent pas les paysans encore moins l’Etat. Presque toute la production est bradée vers les pays limitrophes, sans aucune transformation première. Un manque à gagner pour le Bénin à l’image de tous les pays africains qui exportent en moyenne 90 % de leur production annuelle de noix brutes (un peu plus de 350 000 tonnes soit près du tiers de la production mondiale) essentiellement vers l’Inde. Cette perte serait évaluée à plus 50 millions de dollars (moins de 51 millions d’euros) du fait que l’Afrique exporte à l’état brut plus de 90 % de sa production de noix de cajou, essentiellement vers l’Inde. Décortiquées, les noix repartent aux Etats-Unis et en Europe. Il en résulte un manque à gagner considérable pour les pays africains. Et c’est justement pour pouvoir combattre un tel bradage que le ministre du commerce, Christine Ouinsavi a officiellement lancé à Kétou la campagne de commercialisation groupée de cajou au prix de 175 Fcfa le kilogramme. Un prix d’achat tout de même inférieur à celui de la campagne dernière où le kilogramme est vendu à 200 Fcfa. Une situation que le ministre a tenu à expliquer aux producteurs. " Le prix plancher des noix de cajou retenu par consensus à l’issue de la réunion de la commission permanente d’approvisionnement en facteurs de production, de commercialisation, de produits agricoles et la direction du commerce général le 21 janvier 2009 et entériné par le conseil de ministres est de 175 Fcfa le kilogramme " a-t-elle souligné. De très bonne qualité, la noix de cajou est recherchée sur le marché international. Avec l’Inde en tête de peloton. De sorte que les prix des noix de cajou brutes d’origine béninoise se négocient actuellement à 850 Usd/tonne (442 000 Fcfa/tonne) contre les noix d’origine nigériane qui se négocient elles à 650 Usd/tonne (338 000 FCFA/tonne). Raison de plus pour le gouvernement de faire de la filière cajou, une véritable source de devises surtout en cette période de crise financière et de déclin de la filière coton. Mieux, toute politique de diversification orientée vers le développement de la filière anacarde sera bénéfique pour tous les acteurs concernés et pour le Bénin. Une politique qui devra surtout viser à amener les producteurs à pratiquer les systèmes de production les plus compétitifs et à résorber les divergences d’intérêts observées entre les producteurs qui sont les plus grands perdants face aux commerçants véreux. Et c’est là que madame, le ministre du commerce, Christine Ouinsavi est très attendue en mettant à contribution la Sonapra à travers ses nouvelles prérogatives. Celles de faire la promotion de nouvelles filières (l’ananas, le riz, le palmier à huile, le manioc le soja) et d’augmenter la capacité d’exportation du Bénin en produits de rente..

 

L’Afrique, l’Inde et l’anacarde

 

La suprématie de l’Inde dans le secteur de l’anacarde est écrasante : elle est à la fois le premier producteur mondial (375 000 tonnes en 2001-2002), le premier transformateur de noix de cajou (600 000 tonnes par an) et le premier exportateur (100 000 tonnes par an). La production mondiale des noix d’anacarde se chiffre elle à 1,178 million de tonnes en 2001-2002. La part de l’Inde dans cette production est de 32 %. Dans cette concurrence, l’Afrique ne représente que 28 %. Les principaux producteurs du continent sont la Tanzanie (8 % de la production mondiale), la Guinée-Bissau (8 %), la Côte d’Ivoire (6 %), le Mozambique (3 %) et le Bénin (3 %). Entre 1950 et 1970, le continent noir fournissait 70 % de la production mondiale de noix de cajou. Une baisse qui tient d’abord aux difficultés de la Tanzanie et du Mozambique dans les années 70 et 80. A cela, il faut ajouter d’autres problèmes qui affectent aujourd’hui l’anacarde africain. Il s’agit du manque de matériel végétal performant, des attaques parasitaires, des feux de brousse, la mauvaise gestion, la suprématie d’oligopoles formés pour la plupart des sociétés indiennes qui dictent leur loi aux acteurs locaux... Il urge donc d’inverser la tendance...

Moussa EL-HADJI MAMA



 

Tag(s) : #Politique Béninoise
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